Produits phytopharmaceutiques – Information sur le règlement (CE) n° 1107/2009 du Parlement européen et du Conseil du 21 octobre 2009

Par Me Marie-Coline GIORNO (Green Law Avocats) Actuellement, de nombreuses collectivités s’engagent dans une démarche dite « Zéro Herbicide ». Bien que cette démarche soit tout à fait louable et réponde aux préoccupations environnementales et sanitaires d’une grande partie de la population, il convient de rappeler qu’au niveau juridique, les conditions de mise sur le marché des herbicides s’avèrent strictement encadrées par le règlement (CE) n° 1107/2009 du Parlement européen et du Conseil du 21 octobre 2009 concernant la mise sur le marché des produits phytopharmaceutiques et abrogeant les directives 79/117/CEE et 91/414/CEE du Conseil. Les herbicides appartiennent à une catégorie plus générale appelée « produits phytopharmaceutiques ». Aux termes de l’article 2 du règlement (CE) n° 1107/2009 du Parlement européen et du Conseil du 21 octobre 2009 concernant la mise sur le marché des produits phytopharmaceutiques et abrogeant les directives 79/117/CEE et 91/414/CEE du Conseil, les produits phytopharmaceutiques sont des « produits, sous la forme dans laquelle ils sont livrés à l’utilisateur, composés de substances actives, phytoprotecteurs ou synergistes, ou en contenant, et destinés à l’un des usages suivants: a) protéger les végétaux ou les produits végétaux contre tous les organismes nuisibles ou prévenir l’action de ceux-ci, sauf si ces produits sont censés être utilisés principalement pour des raisons d’hygiène plutôt que pour la protection des végétaux ou des produits végétaux; b) exercer une action sur les processus vitaux des végétaux, telles les substances, autres que les substances nutritives, exerçant une action sur leur croissance; c) assurer la conservation des produits végétaux, pour autant que ces substances ou produits ne fassent pas l’objet de dispositions communautaires particulières concernant les agents conservateurs; d) détruire les végétaux ou les parties de végétaux indésirables, à l’exception des algues à moins que les produits ne soient appliqués sur le sol ou l’eau pour protéger les végétaux; e) freiner ou prévenir une croissance indésirable des végétaux, à l’exception des algues à moins que les produits ne soient appliqués sur le sol ou l’eau pour protéger les végétaux. » En préambule, le règlement (CE) n° 1107/2009 du Parlement européen et du Conseil du 21 octobre 2009 concernant la mise sur le marché des produits phytopharmaceutiques et abrogeant les directives 79/117/CEE et 91/414/CEE du Conseil constate que : « La production végétale occupe une place très importante dans la Communauté. L’utilisation de produits phytopharmaceutiques constitue l’un des moyens les plus importants pour protéger les végétaux et produits végétaux contre les organismes nuisibles, y compris les mauvaises herbes, et pour améliorer la production agricole. Les produits phytopharmaceutiques peuvent cependant également avoir des effets non bénéfiques sur la production végétale. L’utilisation de ces produits peut présenter des risques et des dangers pour l’homme, les animaux et l’environnement, notamment s’ils sont mis sur le marché sans avoir été officiellement testés et autorisés et s’ils sont utilisés d’une manière incorrecte. Le présent règlement a pour objet de garantir un niveau élevé de protection de la santé humaine et animale et de l’environnement, et dans le même temps de préserver la compétitivité de l’agriculture communautaire. Il convient d’accorder une attention particulière à la protection des groupes vulnérables de la population, notamment les femmes enceintes, les nourrissons et les enfants. Le principe de précaution devrait être appliqué et le présent règlement devrait assurer que l’industrie démontre que les substances ou produits fabriqués ou mis sur le marché n’ont aucun effet nocif sur la santé humaine ou animale ni aucun effet inacceptable sur l’environnement. » Fort de ces constatations, le règlement (CE) n° 1107/2009 précité fixe la procédure d’approbation des autorisations de mise sur le marché des produits phytopharmaceutiques. L’approbation d’un produit phytopharmaceutique exige que plusieurs critères soient remplis et une vigilance particulière est apportée à l’examen des effets du produit sur la santé ou l’environnement. Ensuite, les autorisations de mise sur le marché de ces produits sont délivrées au niveau national, conformément à la procédure prévue par ce règlement. En France, la procédure de délivrance des autorisations de mise sur le marché est complétée par des dispositions contenues dans le code rural et de la pêche maritime. Lorsque les critères de délivrance des autorisations de mise sur le marché ne sont pas remplis, les produits phytopharmaceutiques concernés ne peuvent être autorisés. S’ils ne remplissent plus les critères prévus par le règlement, ils doivent être retirés et ne peuvent faire l’objet d’une procédure de renouvellement. Par ailleurs, bien que les produits phytopharmaceutiques fassent l’objet d’autorisations de mise sur le marché délivrées au niveau national suivant une procédure définies par le règlement (CE) n° 1107/2009 précité, les substances actives contenues dans ces produits sont, quant à elles, approuvées directement au niveau de l’Union européenne suivant une procédure prévue dans ce même règlement. Ce règlement précise également les conditions dans lesquelles les substances actives sont renouvelées. Enfin, il détermine les hypothèses dans lesquelles des refus d’approbation ou de renouvellement de substances actives doivent être prononcés. C’est pourquoi de nombreux règlements d’exécution sont pris au niveau de l’Union européenne concernant des substances actives. Quelques exemples récents peuvent ainsi être cités : – Règlement d’exécution (UE) 2015/2082 de la Commission du 18 novembre 2015 concernant la non-approbation de l’Arctium lappa L. (parties aériennes) en tant que substance de base conformément au règlement (CE) n° 1107/2009 du Parlement européen et du Conseil concernant la mise sur le marché des produits phytopharmaceutiques, JOUE L302 du 19 novembre 2015 ; – Règlement d’exécution (UE) 2015/2083 de la Commission du 18 novembre 2015 portant non-approbation de Tanacetum vulgare L. en tant que substance de base conformément au règlement (CE) n° 1107/2009 du Parlement européen et du Conseil concernant la mise sur le marché des produits phytopharmaceutiques, JOUE L302 du 19 novembre 2015 ; – Règlement d’exécution (UE) 2015/2084 de la Commission du 18 novembre 2015 portant approbation de la substance active flupyradifurone, conformément au règlement (CE) n° 1107/2009 du Parlement européen et du Conseil concernant la mise sur le marché des produits phytopharmaceutiques, et modifiant l’annexe du règlement d’exécution (UE) n° 540/2011 de la Commission, JOUE L302 du 19 novembre…

Nouvelles exceptions au silence valant acceptation (décrets 10 nov.2015)

  Par David DEHARBE (Green Law Avocat) Dans sa rédaction tirée de la loi n° 2013-1005 du 12 novembre 2013 (Journal Officiel 13 Novembre 2013), l’article 21 de la loi du 12 avril 2000 (L. n° 2000-321, 12 avr. 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations) prévoit désormais que le silence gardé pendant deux mois par l’Administration sur une demande vaut décision d’acceptation. Près de 1200 exceptions à ce principe ont été instituées par une administration qui a voulu s’octroyer des délais en tous genres pour maintenir le principe du silence valant rejet. Jamais sans doute nos administrations centrales n’auront aussi bien fait la preuve de leur capacité à neutraliser les objectifs des politiques publiques qu’elles ont pourtant pour mission de mettre en œuvre. Mais dès lors que le législateur lui-même leurs donnait des bases juridiques pour instaurer par la voie réglementaire des exceptions au principe, il ne faut pas s’étonner qu’elles se soient multipliées. Le juriste environnementaliste n’a pu que lister celles très nombreuses le concernant (Décret n° 2014-1273 du 30 octobre 2014) : – pour l’autorisation d’un projet soumis à étude d’impact environnemental (Articles L. 122-1, L. 122-3 et R. 122-14 du code de l’environnement), le silence vaut toujours rejet selon des délais prévus par la législation particulière au projet ; – pour l’Autorisation unique de l’expérimentation d’installations, ouvrages, travaux et activités soumis à autorisation au titre de l’article L. 214-3 du code de l’environnement (articles L. 214-3 et suivants du code de l’environnement), le délai de refus est celui prévu par les textes visés ; – pour la dérogation individuelle à un arrêté ministériel de prescriptions générales applicable à une ICPE soumise à autorisation (2ème alinéa de l’article L. 512-5), le délai de refus est de deux mois ; – s’agissant de l’édiction de prescriptions spéciales sur demande d’un tiers pour une ICPE soumise à déclaration (Article L. 512-12 du code de l’environnement), le délai de refus est de deux mois ; – pour l’autorisation temporaire d’exploiter une ICPE pour une durée de 6 mois renouvelable une fois (Article R. 512-37 code de l’environnement), le délai de refus est de 6 mois – pour la modification des prescriptions applicables à l’installation sur demande de l’exploitant d’une ICPE soumise à déclaration (Article R. 512-52), le délai de refus est de 3 mois ; – s’agissant de l’autorisation de changement d’exploitant pour les installations soumises à garanties financières par les 3° et 4° de l’article R. 516-1 (Article R. 516-1), le délai de refus est de 3 mois ; – pour la dérogation à l’interdiction d’opérer des mélanges de déchets dangereux de catégories différentes, de déchets dangereux avec des déchets non dangereux et de déchets dangereux avec des substances, matières ou produits qui ne sont pas des déchets (Article L. 542-7-1 et articles D. 541-12-1 et suivants ), le délai de refus est de 6 mois ; – pour l’autorisation d’exploitation de stockage de déchets inertes (Articles R. 541-68 et R.541-71), le délai est de refus est de 9 mois ; – s’agissant de la sortie du statut de déchet pour des déchets spécifiques à une installation (articles D.541-12-4 à D. 541-12-15) le délai est de 12 mois -pour l’agrément des collecteurs de déchets de pneumatiques non liés par contrat à un organisme collectif représentant les producteurs de pneumatiques (article R. 543-145 du code de l’environnement) le délai de refus est de 6 mois … Au-delà du fait que la variation du délai de refus de 3, 6, 9 mois semble parfaitement arbitraire, cette liste comporte encore son lot d’abus inadmissibles. Ainsi pour la fixation des prescriptions de réhabilitation et des mesures de surveillance après la mise à l’arrêt définitif d’une ICPE soumise à autorisation ou à enregistrement, s’agissant de l’accord sur le mémoire proposé par l’exploitant (II de l’article R. 512-39-3 et II de l’article R. 512-46-28 du code de l’environnement) le délai est d’un an ! De même s’agissant de l’autorisation de travaux de recherche de formations ou de cavités géologiques susceptibles d’être utilisées pour le stockage souterrain de déchets ultimes en l’absence de consentement du propriétaire du sol (article L. 541-17) le délai est de 2 ans ! Quatre nouveaux décrets du 10 novembre 2015 établissent les exceptions au principe selon lequel le silence gardé pendant plus de deux mois par l’administration sur une demande vaut acceptation. Ces décrets listent les procédures dans lesquelles le silence de l’administration vaut décision de rejet à l’échéance des deux mois ou d’un autre délai qu’ils précisent et celles pour lesquelles le silence vaut acceptation à la fin d’un délai autre que de deux mois : – Décret n° 2015-1451 du 10 novembre 2015 relatif aux exceptions à l’application du principe “silence vaut acceptation” sur le fondement du II de l’article 21 de la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations (organismes chargés d’une mission de service public), JO du 11 novembre 2015 ; – Décret n° 2015-1452 du 10 novembre 2015 relatif aux exceptions à l’application du principe “silence vaut acceptation” sur le fondement du 4° du I de l’article 21 de la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations ainsi qu’aux exceptions au délai de deux mois de naissance des décisions implicites, sur le fondement du II de cet article (organismes chargés d’une mission de service public), JO du 11 novembre 2015 ; – Décret n° 2015-1459 du 10 novembre 2015 relatif aux exceptions à l’application du principe “silence vaut acceptation” pour les actes des collectivités territoriales et de leurs établissements publics sur le fondement du 4° du I de l’article 21 de la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations ainsi qu’aux exceptions au délai de deux mois de naissance des décisions implicites sur le fondement du II de cet article, JO du 11 novembre 2015 ; –…

Autorisations des « phyto » : mise en conformité des gammes d’usage « amateur » et « professionnel »

Par Me Marie-Coline Giorno (Green Law Avocat) Le régime des autorisations de mise sur le marché des produits phytopharmaceutiques résulte essentiellement du règlement (CE) n° 1107/2009 du Parlement européen et du Conseil du 21 octobre 2009 concernant la mise sur le marché des produits phytopharmaceutiques et abrogeant les directives 79/117/CEE et 91/414/CEE du Conseil. Le contenu des autorisations de mise sur le marché des produits phytopharmaceutiques est défini à l’article 31 de ce règlement. Aux termes de cet article : « 1. L’autorisation définit les végétaux ou les produits végétaux et les zones non agricoles […] sur lesquelles le produit phytopharmaceutique peut être utilisé et les fins d’une telle utilisation. 2. L’autorisation énonce les exigences relatives à la mise sur le marché et l’utilisation du produit phytopharmaceutique. Ces exigences comprennent au minimum les conditions d’emploi nécessaires pour satisfaire aux conditions et prescriptions prévues par le règlement approuvant les substances actives, phytoprotecteurs et synergistes. L’autorisation inclut une classification du produit phytopharmaceutique aux fins de l’application de la directive 1999/45/CE. […] 3. Les exigences visées au paragraphe 2 comprennent également, le cas échéant: a) la dose maximale par hectare pour chaque utilisation; b) le délai à respecter entre la dernière utilisation et la récolte; c) le nombre maximal d’utilisations par an. 4. Les exigences visées au paragraphe 2 peuvent concerner les points suivants: a) une restriction relative à la distribution et à l’emploi du produit phytopharmaceutique afin d’assurer la protection de la santé des distributeurs, des utilisateurs, des personnes présentes sur les lieux, des habitants, des consommateurs ou des travailleurs concernés ou de l’environnement, en prenant en considération les exigences imposées par d’autres dispositions communautaires; une telle restriction est indiquée sur l’étiquette; b) l’obligation d’aviser, avant l’utilisation du produit, tout voisin qui est susceptible d’être exposé à la dérive de pulvérisation et a demandé à être informé; c) des indications relatives à l’utilisation appropriée conformément aux principes de lutte intégrée contre les ennemis des cultures tels que visés à l’article 14 et à l’annexe III de la directive 2009/128/CE; d) la désignation de catégories d’utilisateurs, tels les professionnels et les non-professionnels; e) l’étiquetage approuvé; f) le délai entre les utilisations; g) le cas échéant, le délai entre la dernière utilisation et la consommation du produit phytopharmaceutique; h) le délai de rentrée; i) la taille de l’emballage et les matériaux qui le composent. » [Souligné par nos soins] Il est donc nécessaire que les autorisations de mise sur le marché de produits phytopharmaceutiques comportent la désignation des catégories d’utilisateurs concernés par les produits, tels les professionnels ou les non-professionnels. En ce qui concerne la désignation des catégories d’utilisateurs tels les professionnels et les non-professionnels prévue au d) du 4° de cet article, l’article D253-8 du code rural et de la pêche maritime prévoit plus précisément que : « I. Selon les catégories d’utilisateurs, les autorisations de mise sur le marché, les permis de commerce parallèle ou d’expérimentation des produits phytopharmaceutiques sont délivrés pour l’une des gammes d’usages suivantes : 1° La gamme d’usages ” professionnel ”, correspondant à l’ensemble des usages réservés aux utilisateurs professionnels au sens de l’article R. 254-1 ; 2° La gamme d’usages ” amateur ”, correspondant à l’ensemble des usages également à disposition des utilisateurs non professionnels. Seuls peuvent être autorisés pour la gamme d’usages ” amateur ” les produits : – dont la formulation et le mode d’application sont de nature à garantir un risque d’exposition limité pour l’utilisateur. Un arrêté du ministre chargé de l’agriculture précise les catégories de produits ne répondant pas à ce critère ; et  -dont l’emballage et l’étiquette proposés, outre qu’ils sont conformes aux exigences réglementaires relatives aux conditions d’étiquetage en vigueur, répondent aux conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l’agriculture. La décision d’autorisation de mise sur le marché des produits relative à la gamme d’usages ” amateur ” comporte la mention ” emploi autorisé dans les jardins ”. Sans préjudice des dispositions des articles 40 et 52 du règlement (CE) n° 1107/2009, sont autorisés pour la gamme d’usages ” amateur ” les produits phytopharmaceutiques bénéficiant d’une autorisation de mise sur le marché dans un autre Etat membre comportant une mention reconnue équivalente. Un arrêté du ministre chargé de l’agriculture établit les modalités de mise en conformité des autorisations existantes au regard des deux gammes de produits susvisées. II. Pour l’application du 1 de l’article 31 du règlement (CE) n° 1107/2009, un catalogue national des usages phytopharmaceutiques, rendu public par le ministre chargé de l’agriculture, répertorie les usages qui peuvent être autorisés pour les produits phytopharmaceutiques, correspondant notamment à l’association d’un végétal, produit végétal ou famille de végétaux avec un ravageur, groupe de ravageurs, maladie ou groupe de maladies contre lequel le produit est dirigé ou avec une fonction ou un mode d’application de ces produits. » [souligné par nos soins] L’arrêté annoncé pour établir les modalités de mise en conformité des autorisations existantes au regard des deux gammes de produits susvisés a été signé le 21 octobre 2015 (consultable ici). Il s’agit d’une signature plutôt tardive dans la mesure où la consultation du public sur le projet d’arrêté s’était déroulée du 3 au 23 juillet 2013. Cet arrêté, relatif à la mise en conformité des autorisations de mise sur le marché et permis de commerce parallèle des produits phytopharmaceutiques et des adjuvants au regard des deux gammes d’usage « amateur » et « professionnel », a été publié au Journal officiel le 30 octobre 2015 et est entré en vigueur le lendemain de sa publication. Il comporte trois articles : – Le premier article prévoit que les titulaires de mise sur le marché et de permis de commerce parallèle de produits phytopharmaceutiques mettent en conformité leurs autorisations et permis avec le dispositif des deux gammes d’usage prévues à l’article R. 253-8 précité. Il est précisé que, le cas échéant, les titulaires d’autorisations et de permis peuvent proposer une requalification au regard des définitions mentionnées à l’article D. 253-9 du même code (« produit de seconde gamme », « produit…

Autorisation de défrichement des bois d’une collectivité territoriale : avis de l’ONF nécessaire

Par Me Marie-Coline Giorno (Green Law Avocat) Aux termes d’un arrêt du 14 octobre 2015, le Conseil d’Etat a précisé sa jurisprudence en matière d’autorisation de défrichement (Conseil d’Etat, 5ème et 4ème sous-sections réunies, 14 octobre 2015, n° 369995). Les faits de l’espèce étaient les suivants. Par un arrêté du 25 mars 2008, le préfet de l’Yonne a autorisé le défrichement de parcelles de bois appartenant à plusieurs communes au profit d’une société. La surface concernée par le défrichement était de moins de vingt hectares. Cet arrêté a été annulé en juin 2009. Le 16 avril 2010, le préfet a de nouveau autorisé le défrichement de ces parcelles par un nouvel arrêté. Une association et un particulier ont demandé l’annulation de l’arrêté du 16 avril 2010 mais le tribunal administratif de Dijon les a déboutés de leur demande par un jugement du 3 janvier 2012. Ils ont interjeté appel de ce jugement. La Cour administrative d’appel de Lyon a, aux termes d’un arrêté du 7 mai 2013, annulé le jugement du tribunal administratif mais a rejeté leur demande. Ils ont donc formé un pourvoi devant le Conseil d’Etat. Le premier moyen invoqué par les requérants consistait à soutenir que la Cour administrative d’appel de Lyon avait commis une erreur de droit dans l’application de l’article R. 311-1 du code forestier alors applicable dès lors qu’aucun acte autorisant le représentant de la personne morale à déposer une demande de défrichement n’avait été jointe à un courrier de 2010 demandant la réouverture de l’instruction de la demande de défrichement. Aux termes de l’article R. 311-1 du code forestier alors applicable : ” La demande d’autorisation de défrichement est adressée par lettre recommandée avec accusé de réception au préfet du département où sont situés les terrains à défricher ou déposée contre récépissé à la préfecture de ce département. / (…) La demande est accompagnée d’un dossier comprenant les informations et documents suivants : / (…) 3° Lorsque le demandeur est une personne morale, l’acte autorisant le représentant qualifié de cette personne morale à déposer la demande ; (…) “. En l’espèce, si l’arrêté préfectoral du 25 mars 2008 mentionne que la demande initiale présentée par la société pétitionnaire, a fait l’objet d’un refus tacite, le Conseil d’Etat précise que ce refus est intervenu du fait du caractère incomplet du dossier et qu’une deuxième demande, identique à la première, a été présentée le 23 janvier 2008 pour régulariser ce dossier. Il souligne ensuite « qu’il en résulte qu’en jugeant que le courrier adressé par la société [pétitionnaire] au préfet le 15 janvier 2010, pour demander la réouverture de l’instruction et souligner l’existence d’une procédure parallèle de distraction du régime forestier, ne constituait pas une demande nouvelle et n’avait donc pas à être accompagnée, en vertu des dispositions de l’article R. 311-1 précité, de l’acte autorisant le représentant qualifié de cette société à déposer la demande, la cour n’a pas commis d’erreur de droit et n’a pas dénaturé les pièces du dossier ». Il écarte donc le moyen invoqué par les requérants. Le deuxième moyen invoqué était relatif à l’application du premier alinéa de l’article R. 122-9 du code de l’environnement alors applicable. Cet alinéa, applicable aux travaux de défrichement et de premiers boisements soumis à autorisation et portant sur une superficie inférieure à 25 hectares disposait que : ” Pour les travaux et projets d’aménagements définis au présent article, la dispense, prévue aux articles R. 122-5 à R. 122-8, de la procédure d’étude d’impact est subordonnée à l’élaboration d’une notice indiquant les incidences éventuelles de ceux-ci sur l’environnement et les conditions dans lesquelles l’opération projetée satisfait aux préoccupations d’environnement “. Les requérants soutenaient que la notice indiquant les incidences du projet de défrichement sur l’environnement devait tenir compte d’une éventuelle distraction ultérieure des parcelles. Or, la Cour avait relevé que la demande d’autorisation de défrichement et la demande de distraction de certaines parcelles du régime forestier faisaient l’objet de deux procédures d’instruction distinctes. Elle avait donc écarté le moyen tiré de l’absence de prise en compte dans la notice élaborée dans le cadre de la procédure d’autorisation de défrichement d’une éventuelle distraction ultérieure des parcelles. Le Conseil d’Etat a validé ce raisonnement, rappelant ainsi une forme d’indépendance des législations. Il a donc également écarté de moyen. Le troisième moyen concernait les mesures de reboisement prévues. Il était soutenu que la Cour avait commis une erreur de droit en estimant que les mesures de reboisement prévues par la notice d’impact et l’arrêté de défrichement étaient définies de manière suffisamment précise au regard des dispositions de l’article L. 311-4 du code forestier, alors applicable. Le Conseil d’Etat a estimé qu’il ressortait du dossier soumis aux juges du fond qu’« il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que l’autorisation de défrichement délivrée par le préfet de l’Yonne le 16 avril 2010 était assortie d’une obligation de reboisement dans une zone précise et d’un calendrier précis et soulignait que le choix des parcelles à reboiser et des essences forestières se ferait en concertation avec les services de l’Etat chargés des forêts ; ». Il a donc confirmé que les mesures de reboisement prévues étaient suffisamment précises et a écarté le moyen invoqué. Le quatrième moyen invoqué concernait la méconnaissance de l’article L. 311-3 du code forestier, alors applicable aux termes duquel “L’autorisation de défrichement peut être refusée lorsque la conservation des bois ou des massifs qu’ils complètent, ou le maintien de la destination forestière des sols, est reconnu nécessaire : (…) / 3° A l’existence des sources, cours d’eau et zones humides et plus généralement à la qualité des eaux “. Aux termes de son arrêt, la Cour avait souligné que les terrains concernés par le défrichement ne recoupaient aucun périmètre de protection de captage d’alimentation en eau potable et qu’il était démontré que l’impact transitoire du défrichement était minime sur l’écoulement des eaux de surface. Elle en avait déduit que l’article L. 311-3 du code forestier alors applicable n’avait pas été méconnu….

Green Law obtient une réserve d’interprétation du Conseil constitutionnel

Le Conseil constitutionnel a été saisi le 18 juin 2015 par le Conseil d’État d’une question prioritaire de constitutionnalité initiée par le Cabinet et relative à la conformité aux droits et libertés que la Constitution garantit des dispositions du tableau du a) du A du 1 de l’article 266 nonies du code des douanes.  La juridiction a rendu sa décision téléchargeable sur son site (décision n°2015-482 QPC du 17 septembre 2015). Les dispositions de ce tableau du code des douanes fixent les tarifs de la taxe générale sur les activités polluantes applicables aux déchets non dangereux qui sont réceptionnés dans une installation de stockage de déchets non dangereux. La société requérante faisait notamment valoir que les tarifs plus favorables prévus par le tableau en cause au profit des installations produisant et valorisant le biogaz, y compris lorsqu’elles réceptionnent des déchets insusceptibles d’en produire, méconnaissent le principe d’égalité devant la loi. Le Conseil constitutionnel a relevé qu’en prévoyant des tarifs plus avantageux pour les déchets susceptibles de produire du biogaz lorsqu’ils sont réceptionnés par les installations de stockage produisant et valorisant le biogaz, le législateur a institué une différence de traitement en adéquation avec l’objectif d’intérêt général poursuivi qui consiste à favoriser la valorisation des déchets au moyen de la production de biogaz. Le Conseil constitutionnel a, en revanche, jugé que l’application des tarifs réduits prévus par les dispositions contestées du tableau aux déchets insusceptibles de produire du biogaz entraînerait une différence de traitement sans rapport direct avec l’objet de la loi. Il en a déduit que ces tarifs réduits ne sauraient être appliqués aux déchets insusceptibles de produire du biogaz réceptionnés par les installations produisant et valorisant le biogaz. Sous cette réserve d’interprétation, le Conseil constitutionnel a donc déclaré les dispositions contestées conformes à la Constitution. Cette décision comme celle de renvoi du Conseil d’Etat (CE, 17 juin 2015, n°389845) nous confirme non seulement l’accessibilité de la justice constitutionnelle mais aussi sa vocation à trancher les questions les plus techniques que posent le droit de l’environnement aux autres matières et en particulier ici au droit douanier. Je remercie toute l’équipe de Green Law Avocats pour l’avoir bien compris et engagé toute l’énergie nécessaire pour obtenir la décision n° 2015-482 QPC. David DEHARBE (Green Law Avocats)