Amende administrative en cas d’inobservation du protocole sanitaire imposé aux entreprises

Amende administrative en cas d’inobservation du protocole sanitaire imposé aux entreprises

Par Maître David DEHARBE (Green Law Avocats) En raison de l’aggravation de la crise sanitaire actuelle en cours depuis presque deux ans maintenant, émanant notamment de la circulation du variant Omicron, les entreprises sont depuis le 3 janvier 2022 tenues de renforcer les mesures sanitaires imposées sur le lieu de travail. Cela passe par l’obligation de télé-travail au moins trois jours par semaine, et la mise en place de mesures d’hygiène et de distanciation sociale sur le lieu de travail. L’employeur, sur le fondement des articles L.4121-1 et suivants du Code du travail, a une obligation de sécurité des salariés, qui vise également la protection de leur santé physique (et mentale). C’est donc sur ce fondement que s’appuient les mesures imposées aux entreprises destinées à limiter la circulation et la transmission de l’épidémie de Covid-19. Dans ce cadre, il est déjà admis un contrôle du respect des conditions d’hygiène et de sécurité par l’inspection du travail, qui en cas de manquement de la part de l’employeur, peut prendre à son encontre des sanctions pénales. En effet, les articles L.4741-1 et suivants du Code du travail posent un régime d’amende pénale suite à tout manquement de l’obligation de sécurité par l’employeur. Il faut d’abord préciser que l’inspecteur du travail doit procéder à un contrôle préalable, et adresser une mise en demeure à l’employeur de corriger les défaillances ainsi constatées. Ce n’est qu’en l’absence ou refus de l’employeur de procéder aux adaptions imposées que l’inspecteur du travail pourra lui adresser l’amende prévue. Cette amende, de 3750 euros, vaut individuellement pour chaque salarié de l’entreprise s’étant retrouvé, en raison du manquement de l’employeur au protocole sanitaire, compromis ou contaminé par le virus. Actuellement, il est discuté devant le Parlement le projet de loi renforçant les outils de gestion de la crise sanitaire et modifiant le code de la santé publique, qui comprend des amendements relatifs justement aux obligations des entreprises envers leurs salariés face à l’épidémie de Covid 19. Plus précisément, un amendement du gouvernement, ajouté le 31 décembre 2021, propose une alternative à la sanction pénale ainsi évoquée. L’objectif serait de créer une sanction administrative aux manquements éventuels constatés par l’inspecteur du travail. En elles-mêmes, les étapes ressemblent à celles de la sanction pénale : l’inspecteur du travail doit constater un ou plusieurs manquements aux protocoles sanitaires imposés, et il faut par la suite que l’employeur ait été mis en demeure par le directeur régional de l’économie, de l’emploi, du travail et des solidarités l’employeur de s’y conformer. Ce n’est que si la mise en demeure est restée sans effet et surtout en l’absence de poursuites pénales que l’inspecteur du travail pourra prononcer l’amende administrative. Il s’agit-là d’une première différence. Le projet de loi cherche à introduire une alternative : soit on poursuit pénalement, soit on sanctionne administrativement. Autre différence : le montant. La où le Code du travail prévoit 3 750 € par salarié exposé au Covid-19, l’amende administrative s’élèverait à 1000 € maximum, mais le principe selon lequel l’employeur paie une amende par salarié exposé à une « situation dangereuse résultant d’un risque d’exposition à la Covid 19 » (selon les termes de l’amendement n°680) demeure. Le montant est par conséquent moins élevé, d’autant plus qu’il est naturellement prévu la possibilité de moduler l’amende selon les circonstances et la gravité du manquement, ainsi que les ressources, charges et comportement de l’employeur. De plus, il est également prévu une possibilité pour l’employeur d’exercer contre cette amende un recours suspensif auprès du ministre chargé du travail, dans un délai de 15 jours à compter de sa notification. Ainsi l’amendement permettrait-il une alternative à une sanction pénale lourde, s’il devait être adopté. Si l’Assemblée nationale avait donné son feu vert, l’amendement a été supprimé par le Sénat, qui s’est réuni et a débattu les 11 et 12 janvier. A voir maintenant la décision retenue après les secondes lectures de l’Assemblée nationale et du Sénat, réunis les 14 et 15 janvier, après un échec de la Commission mixte paritaire.

Nouvelle CAA de Toulouse au 1er janvier 2022

Par Maître Marie KERDILES (Green Law Avocat) En projet depuis 2018, la création d’une neuvième Cour Administrative d’Appel (CAA) à Toulouse sera une réalité le 1er janvier 2022. Prévue pour désengorger ses homologues Bordelaise et Marseillaise, la nouvelle Cour traitera des appels des jugements rendus devant les tribunaux de Toulouse, Nîmes et Montpellier. Le décret n°2021-1583 du 7 décembre 2021 portant création de la CAA de Toulouse précise le calendrier de sa compétence (article 3 du décret) : La CAA sera compétente pour connaître des requêtes enregistrées à compter du 1er mars 2022. Cependant, pour les affaires qui lui sont transférées avant cette date pour une bonne administration de la justice, la CAA de Toulouse pourra également accomplir tout acte de procédure. Les requêtes enregistrées devant les CAA de Bordeaux ou Marseille à compter du 1er mai 2021 (et les requêtes connexes) et qui n’auront pas été inscrites à un rôle de ces cours avant le 1er mars 2022 seront transmises à la CAA de Toulouse. Cette transmission sera réalisée par le Président de la Cour. Elle ne sera pas motivée, et sera notifiée aux parties et au président de la CAA de Toulouse En revanche, les CAA de de Bordeaux et Marseille demeurent saisies des requêtes qui, ne relevant plus de leur compétence territoriale, n’ont pas été transmises à la CAA de Toulouse en vertu des alinéas précédents, sans préjudice des considérations de bonne administration de la justice (article R. 351-8 du code de justice administrative). Les actes de procédure accomplis régulièrement devant les CAA de Bordeaux et de Marseille resteront valables devant la CAA de Toulouse. Le tableau des experts de la CAA de Toulouse sera constitué, pour 2022, des experts inscrits auprès des CAA de Bordeaux et Marseille et ayant un établissement professionnel ou une résidence dans le ressort de la CAA de Toulouse (article 4 du décret). Les demandes d’Aide Juridictionnelle (AJ) présentées avant le 1er mars 2022 formées auprès des CAA de Bordeaux et Marseille pour un appel devant la CAA de Bordeaux lui seront transmises si aucune décision n’a encore été prise sur l’AJ (article 5 du décret). Quant aux demandes d’exécution d’un jugement présentée avant le 1er mars 2022 devant une CAA de Bordeaux ou Marseille, si ce jugement a fait l’objet d’un appel lui-même transmis à la CAA de Toulouse, alors la demande d’exécution sera transmise en même temps (article 6 du décret). Finalement, il sera sans doute nécessaire d’attendre la mise à jour de Télérecours (et de s’assurer de la bonne transmission des informations) avant de considérer que la Cour est fonctionnelle. Une fois la Cour intégrée au site, il sera utile de prendre acte du changement sans délai pour éviter les erreurs de compétence et les transmissions, et de saisir la CAA de Toulouse directement des appels formés au 1er janvier 2022.

Protection fonctionnelle des élus locaux : qui l’accorde et quand ?

Protection fonctionnelle des élus locaux : qui l’accorde et quand ?

Par Maître David DEHARBE, Avocats associé gérant, spécialiste en droit public (Green Law Avocats) Dans un jugement récent (TA Lille, 12 Octobre 2021, n° 1909928) le Tribunal administratif a annulé une décision du 28 juin 2019 de la métropole européenne de Lille accordant la protection fonctionnelle à son président et ordonné sous trois mois à l’E.P.C.I. de récupérer les sommes versées pour le conseil du chef de son exécutif. Certes, il n’est pas contestable qu’en vertu de l’article L. 2123-34 du code général des collectivités territoriales (C.G.C.T.), applicable au président et vice-présidents ayant reçu délégation des établissements publics de coopération intercommunale en vertu des dispositions de l’article L. 5211-15 du même code : « La commune est tenue d’accorder sa protection au maire, à l’élu municipal le suppléant ou ayant reçu une délégation ou à l’un de ces élus ayant cessé ses fonctions lorsque celui-ci fait l’objet de poursuites pénales à l’occasion de faits qui n’ont pas le caractère de faute détachable de l’exercice de ses fonctions ». Reste que le le Tribunal administratif de Lille rappelle à la Métropole européenne de Lille (MEL) que le conseil communautaire, organe délibérant de la MEL, demeure, sauf délégation expresse à son exécutif, seul compétent pour se prononcer sur une demande de protection fonctionnelle d’un élu local (cf. CAA Versailles, 20 déc. 2012, Cne de Servan, no 11VE02556 : AJDA 2013.1497, chron. Agier-Cabanes et CAA Marseille, 14 mars 2014, Cne de Marsillargues, no 12MA01582) et, d’autre part, qu’il n’y a poursuites pénales qu’à compter de la mise en œuvre de l’action publique. Or en l’espèce non seulement la protection fonctionnelle avait été accordée par une décision du premier vice-président de la Métropole, nullement habilité à cette fin ; mais, de surcroît, c’est à la suite d’un simple signalement au Procureur de la République et de l’envoi d’une convocation des services de police mais sans déclenchement de poursuites que la protection fonctionnelle avait été accordée au président par son premier vice-président.

REDEVANCE POST-STATIONNEMENT

Par Maître David DEHARBE (Green Law Avocats) Par une décision relativement récente, la Commission du contentieux du stationnement payant a jugé que « les éventuelles insuffisances, imprécisions ou inexactitudes entachant l’avis de paiement ne sont susceptibles d’empêcher le délai de courir que dans le cas où elles ont été de nature à fausser l’appréciation du destinataire sur l’obligation de payer, sur le montant mis à sa charge ou sur la date limite impartie » (CCSP, 20 mai 2020, n° 18008047). C’est l’occasion de revenir sur ce dispositif qui est encore mal connu des automobilistes. La loi n°2014-581 du 27 janvier 2014 de modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles (dite loi MAPTAM) est venue dépénaliser et décentraliser le stationnement payant sur voirie. En effet son article 63 institue le forfait post-stationnement (FPS). En cas de rejet du recours administratif préalable obligatoire, toute contestation d’un forfait post-stationnement doit être transmise, depuis le 1er janvier 2018, à la commission du contentieux du stationnement payant qui constitue u e nouvelle juridiction administrative spécialisée ; la commission située à Limoges, est compétente pour statuer sur l’ensemble du territoire national. D’application au 1er janvier 2018, le FPS est venu remplacer les amendes forfaitaires en cas de stationnement non payé ou de dépassement du temps pour lequel le stationnement a été payé. Le FPS constitue une redevance d’occupation du domaine public ; c’est donc l’ordre juridictionnel administratif qui est compétent pour l’examen des contestations avec la création d’une nouvelle juridiction administrative spécialisée à compétence nationale, la Commission du contentieux du stationnement payant (CCSP), après avoir effectué un recours administratif préalable obligatoire (RAPO) dans le mois suivant la notification. Notons que la saisine de la CCSSP doit se faire après avoir payé le FPS et dans le délai d’un mois suivant la notification de la décision du RAPO. Néanmoins pour contester le FPS majoré, il faut saisir directement la CCSP sans passer par un RAPO. On est donc ici passé d’une procédure de contestation des procès-verbaux de contravention devant le juge pénal, à une contestation devant le juge administratif. Cependant les infractions relatives au stationnement gênant ou illicite conservent un caractère pénal. Enfin, la CCSP est également compétente pour connaître de l’action en responsabilité à la suite de l’édiction de l’avis de paiement du FPS et, le cas échéant, du titre exécutoire émis (CE, 20 février 2019, n° 422499). Le Conseil d’Etat a déjà eu à juger des modalités de contestation du FPS : selon les juges, ces modalités ne méconnaissent pas les stipulations des articles 6 et 13 de la convention européenne des droits de l’homme, soit le droit au procès équitable et le droit au recours effectif (CE, 30 septembre 2019, n° 421427). Rappelons encore que Les décisions de la commission peuvent faire l’objet, dans un délai de deux mois, d’un recours en cassation devant le Conseil d’État (art. R.2333-120-64 CGCT). L’objectif était de donner compétence aux collectivités territoriales en la matière. En effet, d’après le rapport du Défenseur des droits publié le 14 janvier 2020, ce sont déjà 564 communes ou intercommunalités qui ont opté pour la mise en place de cette réforme. S’agissant des autres collectivités, elles ont soit choisi de maintenir la gratuité du stationnement, soit abandonné le stationnement payant en faveur de la gratuité ou de la mise en place de zones bleues, dispositif permettant également la rotation des véhicules sur la voie publique. Ensuite, chaque collectivité peut choisir de gérer elle-même le contrôle du stationnement payant ou déléguer la gestion à un tiers cocontractant. C’est à la collectivité qu’il revient de fixer le montant de la redevance payé par l’usager pour l’utilisation du domaine public et celui du FPS dû en cas de non-paiement de cette redevance conformément à l’article L. 2333-87 du code général des collectivités territoriales. Ainsi ces montants peuvent varier d’une collectivité à l’autre mais également selon les zones de stationnement d’une même commune. Toutefois, le montant du FPS ne peut être supérieur au montant de la redevance due pour la durée maximale de stationnement autorisée dans la zone où se trouve le véhicule. Notons que le FPS ne concerne pas les personnes titulaires d’une carte mobilité inclusion portant la mention stationnement. En cas de non-respect de paiement du stationnement, le FPS est notifié par avis de paiement qui peut l’être soit par : Dépôt sur le pare-brise du véhicule ; Envoi par courrier au titulaire ; Envoi par mail au titulaire de la carte grise. Cet avis de paiement comporte les informations suivantes : Collectivité et prestataire chargé de contrôler le stationnement payant ; Date et heure du constat ; Adresse de la constatation de stationnement ; Numéro d’immatriculation du véhicule ; Montant du FPS à payer, réduit si nécessaire des montants déjà payés avant le contrôle ; Heure de fin de validité du FPS ; Service auprès duquel le FPS doit être payé ; Possibilité d’un FPS minoré ; Moyens de paiement et date limite de règlement ; Voies et délais de recours. Le montant dû, est minoré si le paiement est effectué rapidement ; à l’inverse, si le paiement est effectué au-delà du délai de 3 mois, il sera majoré. Le FPS peut être payé : Par internet ; Par téléphone ; Par courrier ; Au service en charge des impôts. Il convient de noter que le paiement du FPS ne vaut plus, comme avec une amende contraventionnelle, acceptation de l’infraction. Ce paiement préalable permet de prévenir les recours dilatoires (CE, 30 septembre 2019, n° 421427). Sur ce point, le Conseil d’Etat a récemment renvoyé au Conseil constitutionnel une question prioritaire de constitutionnalité relative à l’article L. 2333-87-5 du code général des collectivités territoriales qui subordonne la recevabilité du recours devant la CCSP au paiement préalable, par le redevable qui conteste la somme mise à sa charge, du montant du FPS sans prévoir de possibilité de dérogation. Le moyen tiré de l’atteinte au droit au recours effectif est jugé suffisamment sérieux pour le Conseil d’État (CE, 10 juin 2020, n° 433276). Il convient de préciser qu’à la suite de la décision du 30 septembre 2019, certains ont estimé que le Conseil d’Etat n’excluait…

Délai pour contester le 2nd tour des municipales : vendredi 3 juillet !

Par Maître David DEHARBE (Green Law Avocats) L’ordonnance n°2020-305 du 25 mars 2020 portant adaptation des règles applicables devant les juridictions de l’ordre administratif avait adopté des délais nouveaux en matière électorale. Mais cette ordonnance ne s’applique qu’au premier tour des élections municipales. En effet, l’article 15, II, 3° de l’ordonnance, dans sa version en vigueur au 30 juin 2020, dispose que « les réclamations et les recours mentionnés à l’article R. 119 du code électoral peuvent être formés contre les opérations électorales du premier tour des élections municipales organisé le 15 mars 2020 au plus tard à dix-huit heures le cinquième jour qui suit la date de prise de fonction des conseillers municipaux et communautaires élus dès ce tour ». Il n’est donc pas ici question du second tour des élections . De même, l’ordonnance n° 2020-390 du 1er avril 2020 relative au report du second tour du renouvellement général des conseillers municipaux et communautaires ne fait pas non plus état d’une dérogation au délai de recours applicable aux protestations déposées à l’encontre des résultats du second tour des élections municipales. Au demeurant comme le deuxième tour s’est déroulé après l’expiration de la « période juridiquement protégée » (période courant du 12 mars 2020 au 23 juin inclus en vertu de l’ordonnance 2020-560 du 13 mai 2020), aucune autre disposition des ordonnances qui avaient prolongé de nombreux délais de recours dans diverses matières ne trouve à s’appliquer. Dans ce contexte, le calcul du délai de protestation pour le second tour des élections municipales de 2020 demeure soumis au droit commun électoral. Les protestations doivent être déposées au plus tard à dix-huit heures le cinquième jour qui suit l’élection (art. R. 119 du code électoral) sachant que ce délai est un délai franc.  C’est la date de réception du recours qui est prise en compte pour le calcul du délai, et non celle du dépôt à la poste (CE, 26 octobre 2001, n°233290). Par conséquent, la date butoir pour déposer un recours contre le second tour des élections municipales, ayant eu lieu le dimanche 28 Juin 2020, est le vendredi 3 juillet à 18h.