Déchet et Assainissement /pouvoirs de police: les apports de la Loi Pélissard du 29 février 2012

 Opérant non plus un partage de certains pouvoirs de police spéciaux entre les maires et le président d’une intercommunalité à fiscalité propre mais un transfert de prérogatives au profit du second, la loi n° 2010-1563 du 16 décembre 2010 de réforme des collectivités territoriales  avait prévu que  les transferts automatiques des pouvoirs de police spéciale au profit du président d’un établissement public de coopération intercommunale  (intervenant dans les domaines de l’assainissement, de l’élimination des déchets ménagers et de la réalisation des aires d’accueil des gens du voyage)  devaient intervenir plus tard le premier jour du douzième mois qui suit la promulgation de la présente loi, soit au 1er décembre 2011 (cf. notre brève du 1er avril 2011, « Police de l’assainissement et des déchets ménagers: l’automaticité du transfert pour les EPCI »).  Toutefois, l’article 63 de cette même loi autorisait, avant l’échéance de cette date et  dans chacun de ces trois  domaines, un ou plusieurs maires  à s’opposer au transfert des pouvoirs de police.  A cette fin, ils pouvaient notifier leur opposition au président de l’établissement public de coopération intercommunale (EPCI), le  transfert n’ayant pas lieu pour les communes dont le maire a notifié son opposition ! Cependant, alors que dans les six mois suivant l’élection du président d’une intercommunalité et dans l’hypothèse d’une opposition au transfert de leurs pouvoirs de police par un ou plusieurs maires, ce même article 63 (codifié à l’article L. 5211-9-2 du CGCT) autorisait le président d’un établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre à refuser le transfert des pouvoirs de police spéciale des maires des communes membres, aucune disposition  législative particulière n’avait été prévue pour que le président d’une intercommunalité à fiscalité propre puisse s’opposer à un tel transfert de prérogatives à son profit  avant le 1er décembre 2011. Par voie de conséquence, en raison de l’automaticité des transferts, lorsque certains maires des communes membres des intercommunalités concernées ont manifesté leur opposition au transfert avant le 1er décembre 2011, les présidents des intercommunalités à fiscalité propre et des groupements ont été investis des pouvoirs de police spéciale – qu’ils exercent seuls – dans ces 3 domaines sur une partie seulement du territoire intercommunal. L’élasticité des transferts de compétences automatique, s’ajoutait une modulation territoriale de l’exercice effectif des pouvoirs de police dans un ou plusieurs de ces domaines ! Dès lors qu’aucune disposition transitoire n’avait été adopté par le législateur, l’exercice des prérogatives de police s’en trouvait nécessairement complexifié (cf. Q. n°111407 de M. Jacques Le Nay, JORF, A. N., 21/06/2011, p. 6461 ; réponse ministérielle publiée au JORF, A.N., 06/09/2011, p.9566) Pour corriger cette lacune de la loi de réforme des collectivités territoriales de 2010, l’article 9 de la  loi n° 2012-281 du 29 février 2012 visant à assouplir les règles relatives à la refonte de la carte intercommunale dite loi « Pélissard »  (publiée au JORF du 1er mars 2012) a remanié le contenu de l’article L. 5211-9-2 du code général des collectivités territoriales (CGCT) et celui de l’article 63 de la loi n° 2010-1563 .   Aux termes de la nouvelle rédaction de l’article 63 de la loi n° 2010-1563 du 16 décembre 2010 : « dans un délai de trois mois suivant la promulgation de la loi n° 2012-281 du 29 février 2012 visant à assouplir les règles relatives à la refonte de la carte intercommunale, si un ou plusieurs maires des communes concernées se sont opposés au transfert de leurs pouvoirs de police, le président de l’établissement public de coopération intercommunale peut renoncer, dans chacun des domaines mentionnés aux trois premiers alinéas dudit I, à ce que les pouvoirs de police spéciale des maires des communes membres lui soient transférés de plein droit. » ; b) A la fin de la dernière phrase, les mots : « n’a pas lieu » sont remplacés par les mots : « prend fin à compter de cette notification ». Autrement dit,  avec la loi n° 2012-281 du 29 février 2012, le président d’un EPCI disposant de transferts de pouvoirs de police spéciale à la carte, entre autres dans les domaines de l’assainissement et des déchets ménagers,  peut y renoncer avant le 1er juin 2012. Sa décision de restitution des prérogatives de police est alors notifiée aux maires par courrier.   Ensuite, les conditions de transferts de prérogatives de police en matière de  gestion des déchets ménagers qui valent  pour l’ensemble des  groupements de collectivités   (et non pas exclusivement pour les EPCI à fiscalité propre) sont également remaniées. En effet, l’article 79 de la loi n° 2011-525 du 17 mai 2011 de simplification et d’amélioration de la qualité du droit a étendu l’automaticité de transfert de compétence et d’exercice des prérogatives de police du maire.  Pour les autres prérogatives de police, tout transfert de pouvoir de police au président d’un syndicat intercommunal ou d’un syndicat mixte est exclu.    Reste que pour des motifs liés à l’efficacité de l’action publique dans la gestion des déchets ménagers (puisque le transfert des pouvoir de police autorise le président à réglementer la présentation des déchets et, de manière plus générale, à fixer les modalités concrète de la collecte des déchets), la loi n° 2011-525 du 17 mai 2011 a ouvert le bénéfice du transfert automatique d’exercice des prérogatives de police au président d’un syndicat compétent en matière de déchets ménagers. Mais, initialement, ici encore,  la restitution de compétence – en cas d’opposition des maires – n’était envisagée qu’à la suite de l’élection du président. De surcroît, seuls les maires étaient visés par le transfert de prérogatives de police et non pas l’ensemble des membres d’un établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre membre du groupement de collectivités. Aussi, des rectificatifs ont été introduits par la loi « Pélissard » du 29 février 2012 : la nouvelle rédaction de l’article 63 de la loi de réforme des collectivités territoriales précise que « dans un délai de trois mois suivant la promulgation de la loi n° 2012-281 du 29 février 2012 précitée, un ou plusieurs maires peuvent s’opposer, dans le domaine de la gestion des déchets ménagers,…

Eau potable, modulation des aides financières: le Conseil constitutionnel censure certaines dispositions législatives

Dans une décision n°2011-146 QPC du 8 juillet 2011 (“Département des Landes”), le Conseil constitutionnel saisi d’une question prioritaire de constitutionnalité a invalidé les dispositions législatives adoptées en 2006 interdisant toute modulation des aides publiques accordées aux communes et aux groupements de collectivités territoriales en fonction du mode de gestion des services d’eau potable et d’assainissement (art. L. 2224-11-5 du CGCT).    Ce faisant, cette décision est favorable au Conseil général des Landes qui, en dépit de l’interdiction législative formulée à l’article 54 de la loi n°2006-1772 du 30 décembre 2006 sur l’eau et les milieux aquatiques (art. L. 2224-11-5 du CGCT), avait maintenu, dans son ressort géographique, le principe de la modulation à la hausse des subventions accordées aux communes et à leurs groupements dès lors que les services publics de l’eau potable et de l’assainissement étaient gérés en régie.   Cette décision constitue, en outre, l’aboutissement d’un bras de fer contentieux dans lequel le département des Landes se trouvait impliqué et qui avait débuté en 1996 par l’adoption d’une délibération décidant de faire varier les aides aux communes et à leurs groupements soit à la hausse soit à la baisse en fonction du mode de gestion de ces services (en régie ou en gestion déléguée).     Si, en cassation, le Conseil d’Etat avait pu admettre que le principe de libre administration n’empêchait pas que les régions et les départements modulent le montant de leurs subventions versées aux communes et à leurs groupements selon le mode de gestion du service (CE, 12 décembre 2003, Département des Landes, aff. 236442, conclusions François Séners, RFDA 2004, p. 518), les parlementaires s’étaient saisis de la question lors de la discussion portant sur le projet de loi sur l’eau et les milieux aquatiques pour, au final, interdire toute variation des aides publiques locales selon le mode de gestion des services de distribution de l’eau et de l’assainissement.    L’adoption d’une délibération  du Conseil général des Landes, le 7 novembre 2008, directement contraire aux dispositions de l’article L. 2224-11-5 du CGCT, objet d’un recours contentieux, va mener le juge administratif à introduire une question préjudicielle de constitutionnalité relative à la conformité de ces dispositions législatives avec le principe de libre administration des collectivités territoriales posé à l’article 72 de la Constitution.    La  position retenue par le Conseil constitutionnel a été révélée dans la décision n° 2011-146 QPC du 8 juillet 2011 : après avoir souligné que « si le législateur peut, sur le fondement des articles 34 et 72 de la Constitution, assujettir les collectivités territoriales ou leurs groupements à des obligations, ou les soumettre à des interdictions, c’est à la condition, notamment, que les unes et les autres répondent à des fins d’intérêt général », le Conseil constitutionnel  déclare les dispositions législatives comme étant contraires à la Constitution en ce qu’elles restreignent la liberté d’administration des départements au point de méconnaître  les articles 72 et 72-2 de la Constitution. En conséquence, depuis la publication de la décision au JORF (soit le 9 juillet 2011), les collectivités  régionales et départementales peuvent légalement introduire un régime différencié d’aides publiques aux communes et à leurs groupements pour la gestion des services publics de l’eau potable et de l’assainissement.   Désormais, aucune disposition législative n’interdit à  l’une de ces collectivités d’inciter financièrement les communes et les intercommunalités à opter pour une gestion directe de ces services plutôt que pour une gestion déléguée.    L’usager devrait pouvoir se satisfaire de cette censure constitutionnelle puisque le prix de l’eau est moindre en présence d’un service géré en régie par les communes et les intercommunalités !    Patricia Demaye-Simoni  Maître de conférences en droit public

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