Parc solaire en zone agricole: seule une révision générale du PLU est possible

C’est ce qu’a jugé la Cour administrative d’appel de Nantes le 30 septembre 2011 (Cour administrative d’appel de Nantes, 30 septembre 2011, Préfet de la Mayenne, n°11NT01176: CAANantes_30_09_2011_11NT01176_centralePV). Par cet arrêt, la Cour administrative d’appel suspend en référé spécial (fondé sur les dispositions de l’article L. 554-1 du code de justice administrative) l’exécution d’une délibération ayant approuvé une modification du plan d’occupation des sols portant sur la création d’un sous-secteur NCer en zone NC (ancienne dénomination des zones agricoles). La Commune avait en effet approuvé la simple modification de la zone NC en vue de permettre l’implantation de la centrale photovoltaïque. Le doute sérieux sur la légalité de l’acte est caractérisé par : – la contrariété au plan d’occupation des sols – l’irrégularité du choix de la procédure de modification (méconnaissance des articles L. 123-13 et L. 123-19 du code de l’urbanisme) “Considérant que le PREFET DE LA MAYENNE soutient que la création d’un sous-secteur NCer, autorisant l’implantation d’une activité industrielle de production d’énergie solaire en zone agricole du POS de Vaiges, constitue une atteinte à la destination des sols et a pour effet la réduction des espaces agricoles, en méconnaissance des objectifs d’aménagement initialement définis dans le rapport de présentation et consistant à préserver les terres et l’activité agricole en zone NC ; qu’eu égard à la superficie et à la nature du projet, la modification opérée est de nature à porter atteinte à l’économie générale du plan et à restreindre l’espace agricole […]” Rappelons qu’au terme de l’article L. 123-13 du code de l’urbanisme qui s’applique aux anciens POS comme le rappelle l’arrêt, la procédure de modification ne peut être mise en oeuvre qu’à condition que la modification envisagée : « a) Ne porte pas atteinte à l’économie générale du projet d’aménagement et de développement durables mentionné à l’article L. 123-1-3 ; b) Ne réduise pas un espace boisé classé, une zone agricole ou une zone naturelle et forestière, ou une protection édictée en raison des risques de nuisance, de la qualité des sites, des paysages ou des milieux naturels ; c) Ne comporte pas de graves risques de nuisance. » En l’espèce, une modification du PLU destinée à autoriser l’implantation d’un parc photovoltaïque en zone A est irrégulière, dès lors qu’au regard de la superficie et de la nature du projet, cette modification est de nature à porter atteinte à l’économie générale du plan et à restreindre l’espace agricole. C’est ce qu’a jugé la CAA de Nantes: “que, dès lors, la délibération contestée a été prise en méconnaissance des dispositions susmentionnées des articles L. 123-13 et L. 123-19 du code de l’urbanisme ; qu’il s’ensuit que les changements ainsi approuvés ne relevaient pas de la procédure de la modification, mais exigeaient la mise en oeuvre de la procédure de la révision générale, comme l’a relevé le commissaire enquêteur.” Malgré la formule utilisée, la nature et de la superficie du projet ne semblent pas constituer des critères déterminants : un projet de moindre envergure aurait lui aussi entraîné une réduction de l’espace agricole. Une modification simplifiée du PLU n’était pas non plus envisageable, l’article R. 123-20-2 du code de l’urbanisme n’autorisant la mise en oeuvre de la procédure que pour les centrales photovoltaïques implantées en zone N. Même obstacle s’agissant d’une révision simplifiée, celle-ci n’étant autorisée par l’article L 123-13 alinéa 9 du code de l’urbanisme que pour la « réalisation d’une construction ou d’une opération, à caractère public ou privé, présentant un intérêt général notamment pour la commune ou toute autre collectivité ». L’intérêt général d’une centrale photovoltaïque, édifiée pour le compte d’un opérateur privé, et dont l’électricité n’est pas dédiée directement à des équipements publics, ne pourrait, à notre sens, être caractérisé. En définitive, l’unique solution réside dans la mise en oeuvre d’une procédure de révision générale du PLU, procédure plus contraignante. Alors que des allégements procéduraux avaient été spécifiquement prévus en 2009 pour les centrales solaires en zone N (cf article  R123-20-2 CU). Cette solution doit être retenue avec attention par les professionnels du secteur qui, s’ils sont incités à utiliser les friches mêmes agricoles (au delà des anciens CET, carrières etc…), n’en sont pas mons soumis au classement de la zone sur le plan de l’urbanisme. Anaïs DE BOUTEILLER Avocat au Barreau de Lille Green Law Avocat

Projet d’ordonnance sur les documents d’urbanisme : la clarification des règles applicables aux documents d’urbanisme

Mis en ligne le 23 septembre 2011 sur le site du ministère de l’Ecologie, le projet d’ordonnance relative à l’élaboration et à l’évolution des documents d’urbanisme  est ouvert à  consultation publique jusqu’au 21 octobre 2011 (Projet_d_ordonnance urbanisme). En effet, en application de l’article 25 de la loi n° 2010-788 Grenelle II, le Gouvernement a été autorisé à opérer une réforme des procédures d’élaboration et d’évolution des documents d’urbanisme dans un délai de 18 mois, soit avant le 12 janvier 2012 (pour une entrée en vigueur fixée en principe au 1er mars 2012 sauf pour les procédures en cours). Comportant 50 pages, le projet d’ordonnance relative à l’élaboration et l’évolution des documents d’urbanisme réorganise les dispositions législatives  du livre Ier du code de l’urbanisme afin d’en faciliter la lecture et la compréhension en même temps qu’il assure la mise en oeuvre du Grenelle de l’environnement. Des dispositions liminaires (posées aux articles L. 1 et L. 2) révisent  la formule de principe posée à l’article L. 110 du code de l’urbanisme. Gestionnaires et garantes du territoire français, dans le cadre de leurs compétences respectives, il est précisé que les collectivités publiques «harmonisent leurs prévisions et leurs décisions d’utilisation de l’espace dans le respect réciproque de leur autonomie et en prenant en compte l’occupation des sols dans les territoires des Etats limitrophes» (art. L.1). Les objectifs communs, poursuivis par les collectivités publiques en matière d’urbanisme, dans le respect des objectifs de développement durable, sont  déclinés à l’article L. 2, à savoir : 1. L’équilibre entre le renouvellement urbain, l’utilisation économe des espaces et la sauvegarde  des ensembles urbains et du patrimoine bâti remarquables ; 2. La diversité des fonctions urbaines et rurales et la mixité sociale dans l’habitat ; 3. La sécurité et la salubrité publiques ; 4. La réduction des émissions de gaz à effet de serre… ; 5. La lutte contre le changement climatique et l’adaptation à ce changement. En dehors de ces dispositions liminaires, quatre domaines de l’urbanisme  sont affectés  par les dispositions de l’ordonnance : la concertation, les schémas de cohérence territoriale (SCOT), les plans locaux d’urbanisme (PLU) et les cartes communales. Relativement aux règles entourant les modalités de la concertation , l’ordonnance reprend la liste des cas actuels dans lesquels la consultation est obligatoire, à savoir pour l’élaboration d’un SCOT (schéma de cohérence territoriale) ou d’un PLU (plan local d’urbanisme), pour toute création de zone d’aménagement concerté ou pour toute opération d’aménagement ayant pour effet de modifier de façon substantielle le cadre de vie ou l’activité économique dont la liste est arrêtée par décret en conseil d’Etat.  Une concertation facultative peut encore être organisée soit par le préfet (s’il a pris l’initiative de la révision d’un document d’urbanisme ou d’une opération) soit par l’organe délibérant de la collectivité ou du groupement compétent (cf. art. L. 4 à L. 6). Concernant le SCOT , au delà de d’une plus grande  recherche de clarté et d’intelligibilité dans la nouvelle présentation des procédures existantes déjà renouvelées par la loi Grenelle II (cf. P. Galan, «La réforme des documents d’urbanisme  par la loi portant engagement national pour l’environnement», JCP ACT n° 43, 25/10/2010, 2232), quelques modifications sont introduites.  Parmi ces modifications, l’on relèvera l’extension  des hypothèses dans lesquelles le préfet peut demander, dans un délai de 2 mois,  la révision du SCOT (pour incompatibilités manifestes avec l’utilisation des sols ou l’affectation des sols des communes voisines ;  pour contrariété avec un programme d’actions précisant les aménagements et les orientations de gestion destinés à favoriser l’exploitation agricole, la gestion forestière, la préservation et la valorisation des espaces naturels et des paysages ; pour incompatibilités manifestes avec l’organisation des transports prévue par l’autorité organisatrice des transports territorialement compétente) (art. L. 145-46 du CU) ou encore l’extension du champ d’application de la mise en révision du SCOT ( celle-ci peut intervenir en cas de changement des orientations du PADD – projet d’aménagement et de développement durable – mais aussi et désormais en cas de changement du DOO – document d’orientation et d’objectifs – pour les dispositions relatives aux objectifs chiffrés de consommation économe de l’espace et de lutte contre l’étalement urbain et celles concernant la protection des espaces fragiles ou encore lorsque l’établissement décide de changer les dispositions du DOO de la politique de l’habitat pour en diminuer l’objectif global concernant l’offre de logement) (art.  L. 154-49 du CU). Quant aux PLU , eux-aussi déjà réformés par la loi Grenelle II (cf. H. Jacquot et J.-P. Lebreton, « La réforme du plan local d’urbanisme », AJDA 2010, p. 1697), dont la vocation intercommunale a été accentuée  en 2010  (cf. A. Graboy-Grobesco, « La loi Grenelle II et les documents de planification territoriale, DA n°2, février 2011, étude 4 ; cf. notre brève du 7 mars 2011, « SCOT/PLU, projet de décret : de nouvelles obligations en perspective ») et se trouve ajustée par le projet d”ordonnance (art. L. 164-5 du CU), la réécriture des dispositions du code de l’urbanisme y touchant s’opère essentiellement mais pas uniquement à droit constant. Ainsi, tout comme pour les SCOT (avec la procédure de modification simplifiée requérant uniquement une mise à disposition du public pour une durée d’un mois (art. L. 154-73 à L. 154-75 du CU)), la procédure de modification est révisée pour distinguer entre la procédure de droit commun pour laquelle une enquête publique s’impose et la procédure simplifiée qui passe par une mise à disposition du public pour une durée d’un mois (art. L. 164-57 à L. 164-62 du CU).  Par ailleurs,  dans le sillage de la jurisprudence du 18 février 2010 « Lille Métropole, Communauté urbaine (req. n° 318234),  l’article L. 164-31 du CU précise, qu’à la suite de l’enquête publique, le PLU peut être modifié pour tenir compte des avis qui ont été joints au dossier ainsi que le résultat de l’enquête. Et les prérogatives préfectorales sont également sensiblement renforcées puisque le  préfet peut demander  des modifications aux PLU dont  l’adoption conditionne son caractère exécutoire en cas d’absence de réponse aux objectifs de répartition…