Solaire / liquidation des installateurs photovoltaïques : tout n’est pas perdu en cas de conclusion de contrat de crédit affecté ! (acte II)

Par un jugement en date du 14 février 2014 (Tribunal d’instance QUIMPER, 14 février 2014, RG n°11-13-000438), le Tribunal d’instance de QUIMPER confirme la résolution du contrat de crédit signé par les particuliers pour financer leur installation photovoltaïque dès lors que la résolution du contrat principal est encourue et prononcée judiciairement. Ce jugement confirme donc un courant jurisprudentiel dont nous nous étions fait l’écho dans un précédent article (Article du 14 avril 2014, C. d’appel de LIMOGES, 24 janvier 2014, RG n°12/01358), En l’espèce, des particuliers avaient contracté auprès d’une société spécialisée dans la fourniture et la pose d’un système solaire photovoltaïque. Très rapidement, ils ont reproché à la société de ne pas avoir effectué les travaux dans les règles de l’art et les opérations de branchement alors que cela avait été contractuellement prévu au contrat. Comme souvent, les particuliers avaient contracté un contrat de crédit accessoire auprès d’une banque afin de financer ledit projet. Il est par ailleurs à noter que la société installatrice était entrée, dans l’intervalle, en procédure collective. Sur le plan juridique, les particuliers sollicitaient de la juridiction que les irrégularités du bon de commande soient constatées au visa des dispositions du code de la consommation. C’est exactement ce que la juridiction de QUIMPER constate en jugeant :  « Le contrat dénommé : « demande de candidature au programme Maison Verte » signé le 23 avril 2012, à leur domicile, entre M. et Mme … et le représentant de la SARL …., après un démarchage téléphonique est affecté de nombreuses irrégularités au regard des articles L 121-23 du code de la consommation et suivants du Code civil. Notamment, la nature et les caractéristiques précises des biens et prestations offerts, la mention de la faculté de renonciation et les conditions d’exercice de celle-ci, la mention intégrale des articles L121-23 à L121-26 du code de la consommation ne sont pas indiquées. De plus, le formulaire utilisé est dépourvu de bordereau de rétractation conforme aux dispositions du code de la consommation (…) La nullité du contrat est évidente ». Ce type de contrat est malheureusement monnaie courante et un flux jurisprudentiel en est attendu puisqu’à la nullité du contrat s’ajoute fréquemment des malfaçons on non exécution de contrat, puis la liquidation judiciaire de la société ayant usé de pratiques trompeuses. Le Tribunal d’instance de QUIMPER tire ensuite les conséquences de cette nullité sur le contrat de crédit affecté en jugeant qu’:  « Elle entraîne en application des dispositions de l’article L 311-32 du code de la consommation celle du contrat de crédit ». Ce jugement est intéressant puisqu’il rappelle l’interdépendance du contrat principal et du contrat de crédit affecté et les conséquences découlant de la résolution du contrat principal sur le second. A noter que la loi n°2014-344 du 17 mars 2014 a réformé plusieurs dispositions du code de la consommation intéressant les opérations de démarchage. On retiendra que le nouvel article L111-1 I du code de la consommation impose des obligations plus étendues à la charge du professionnel puisque ce dernier doit informer le consommateur les informations suivantes : Les caractéristiques essentielles du bien ou du service. Il est précisé que cette information doit être faite en fonction du support de communication utilisé : on ne donne pas autant de détail sur les caractéristiques du bien si celui-ci est exposé en vitrine ou si la commande se fait par téléphone ; Le prix du bien ou du service selon les modalités de l’article L. 113-3 qui n’a pas été modifié ; La date ou le délai dans lequel le professionnel livrera le bien ou exécutera le service ; L’identification du professionnel, un décret en Conseil d’État fixera les éléments de cette identification. Un autre décret, prévu à l’article L. 111-2-1 nouveau, précisera les informations à donner lorsque le contrat porte sur la fourniture de services et ne donne pas lieu à un écrit. Surtout, aux termes de l’article L212-21 du Code de la consommation le consommateur dispose dorénavant d’un délai de quatorze jours pour exercer son droit de rétractation d’un contrat conclu à distance, à la suite d’un démarchage téléphonique ou hors établissement, sans avoir à motiver sa décision. Rappelons que ces nouvelles dispositions ne s’appliquent aux contrats conclus après le 13 juin 2014. Nul doute que les dispositions protectrices, rappelées dans ce jugement par le Tribunal d’instance de QUIMPER, resteront plus que jamais d’actualités malgré la réforme récente du code de la consommation. Aurélien BOUDEWEEL Green Law Avocat

Natura 2000: le décret du 16 août 2011 modifie l’évaluation des incidences

Les sites Natura 2000 – issus de la réglementation européenne – dont l’objet  est de préserver les habitats naturels et les espèces animales et végétales couvrent 7 millions d’hectares représentent plus de 12 % du territoire métropolitain. En raison de leur fragilité, ils sont soumis à des mesures de protection adaptées, sachant que les projets et les programmes susceptibles de les affecter doivent contenir une évaluation de leurs incidences sur ces sites. Aussi, afin de se conformer aux objectifs de la directive 92-43 du 21 mai 1992 (concernant la conservation des habitats naturels ainsi que de la faune et de la flore) et d’éviter une nouvelle procédure en manquement contre l’Etat français (cf. CJCE, aff. C-241/08, Commission c/ République française.), l’article 13 de la  loi n° 2008-757 du 1er août 2008 relative à la responsabilité environnementale a  créé une procédure d’évaluation préalable des incidences sur les sites Natura 2000 pour un certain nombre d’activités encadrée par un régime administratif d’autorisation, d’approbation ou de déclaration participant d’une législation distincte du réseau Natura 2000. Reste que la transposition a été jugée insatisfaisante : cf. CJUE, 4 mars 2010, aff. C-241/08, condamnation qui a été suivie de l’adoption du décret n°2010-365 du 9 avril 2010 relatif à l’évaluation des projets susceptibles d’avoir des incidences sur les sites Natura 2000 Codifiées à l’article L. 414-4 du code de l’environnement, tel que modifié par la loi n° 2010-788 du 12 juillet 2010 portant engagement national pour l’environnement, les dispositions législatives étendent l’évaluation requise aux activités non soumises à encadrement dont la liste locale est fixée par l’autorité administrative (par référence à une liste nationale établie par  décret en Conseil d’Etat). Par ailleurs, désormais, tout document de planification, programme ou projet ainsi que manifestation ou intervention susceptible d’affecter de manière significative un site Natura 2000 et qui ne figure pas sur les listes mentionnées fait l’objet d’une évaluation des incidences Natura 2000 sur décision motivée de l’autorité administrative. Le décret n° 2011-966 du 16 août 2011 relatif au régime d’autorisation administrative propre à Natura 2000, entré en vigueur le 19 août 2011, met en oeuvre ces dispositions : il dresse un tableau national de référence  (assorti de seuils et restrictions) des documents de planification, programmes ou projets ainsi que des manifestions et interventions ne relevant pas d’un régime d’autorisation, d’approbation ou de déclaration (art. R 414-27 du CE).  La liste nationale  comporte 36 documents de planification, programmes ou projets manifestations ou interventions parmi lesquels sont placées les éoliennes dont la hauteur du mât et de la nacelle au dessus du sol est inférieure à 12 mètres ou les ouvrages de production d’électricité à partir de l’énergie solaire installés sur le sol dont la puissance crête est inférieure à 3 kilowatts et dont la hauteur maximum au-dessus du sol ne peut pas dépasser 1.80 mètre lorsque la réalisation est prévue en tout ou partie à l’intérieur d’un site Natura 2000. De plus, le décret n° 2011-966 décrit la procédure applicable pour les personnes visées par l’article L. 414-4-IV qui doivent solliciter une autorisation préfectorale avant d’élaborer un document de planification, réaliser un programme ou un projet, organiser  une manifestation ou procéder à une intervention dans le milieu naturel et le paysage qui ne relève pas d’un encadrement direct de la législation Natura 2000 mais figurent sur la liste locale arrêté par l’autorité préfectorale (art. R 414-28 du CE).  Le dossier de demande, instruit par l’autorité préfectorale qui a établi la liste locale, doit comporter une évaluation des incidences Natura 2000. Quant aux documents de planification, programmes ou projets ainsi que manifestations ou interventions susceptibles d’affecter de manière significative un site Natura 2000 et qui ne figurent pas sur une liste (art L. 414-4 IV bis), ils sont soumis à une évaluation des incidences Natura 2000 sur décision motivée de l’autorité administrative qui n’est autre que celle compétente pour autoriser, approuver ou recevoir la déclaration (art. R. 414-29 du CE). Pour conclure, l’on doit constater de manière bien plus générale que l’on assiste à  un mouvement d’extension des procédures d’évaluation auquel doivent être attentifs les promoteurs de projets éoliens. Face au durcissement de la réglementation, les évaluations doivent être strictement menées et le choix de l’implantation des éoliennes mûrement réfléchi. D’autant que dans un récent arrêt de la CJUE du 21 juillet 2011 ( aff. C 2-10), la cour a admis que les directives habitat (92/431/CEE) et oiseaux (79/409/CEE) ne s’opposaient pas à l’instauration d’une réglementation interdisant l’installation d’aérogénérateurs non destinés à l’autoconsommation sur des sites appartenant au réseau Natura 2000, sous réserve cependant du respect des principes de non-discrimination et de proportionnalité. Patricia Demaye-Simoni Maître de conférences en droit public