Diagnostic de performance énergétique : son absence à l’acte n’entraîne pas l’annulation de la vente !

Par un arrêt en date du 8 juillet 2014 (C.cass., 3ème civ.,8 juillet 2014, n°13-19-330) la Cour de cassation rappelle dans le cadre d’un litige relatif à la vente d’un immeuble, que l’absence de diagnostic de performance énergétique au dossier de vente n’entraîne pas pour autant son annulation. En l’espèce, après qu’un contrat de vente fût signé, les  acquéreurs ont sollicité par la voie judiciaire la nullité de ce dernier au motif que le droit de rétractation prévu par l’article L. 271-1 du CCH n’aurait pas été régulièrement purgé. Selon eux, le délai de rétractation n’aurait pas commencé à courir, faute d’avoir annexé au compromis le diagnostic de performance énergétique (DPE) et l’état des risques naturels et technologiques. Ils ajoutent enfin et compte tenu de la notification du cahier des charges et du règlement du lotissement, postérieurement à la signature du compromis, qu’il aurait fallu procéder à une nouvelle purge du délai de rétractation Rappelons que le législateur contemporain a multiplié les diagnostics obligatoires avant toute vente immobilière, effectués par des organismes agréés et devant figurer en annexe de la promesse de vente ou, à défaut de promesse, dans l’acte authentique de vente. La plupart de ces annexes sont contenues dans le dossier de diagnostic technique prévu par l’ordonnance n° 2005-655 du 8 juin 2005 (art. L. 271-4-I du Code de la construction et de l’habitation et Décret n° 2006-1114, 5 sept. 2006). Notons que les articles L. 134-3 du Code de la construction et de l’habitation et L. 271-4 et suivants du même code prévoient que dans le cas d’une vente d’immeubles existants, le diagnostic de performance énergétique (DPE) doit être annexé à la promesse de vente. Dans le cadre du litige qui lui était soumis, la Cour de cassation confirme l’appréciation portée par la Cour d’appel qui avait rejeté la demande des acquéreurs en retenant que : « Attendu qu’ayant souverainement retenu que M. et Mme X… s’étaient engagés en toute connaissance des contraintes environnementales du lotissement sans que leur consentement ne fût vicié et qu’en signant l’acte authentique sans émettre de réserve ils avaient renoncé à se prévaloir de l’irrégularité de la purge du droit de rétractation, la cour d’appel, qui n’a pas modifié l’objet du litige ni violé le principe de la contradiction et devant laquelle il n’était pas soutenu que l’objet de la vente avait été substantiellement modifié par les documents remis après la signature de la promesse de vente, a pu déduire de ces seuls motifs, sans être tenue de procéder à une recherche que ses constatations rendaient inopérante, que les demandes des acquéreurs devaient être rejetées». L’arrêt rendu par la Cour de cassation confirme plusieurs décisions déjà rendues par les juridictions du fond. Une jurisprudence abondante rappelle que le DPE n’est exigible que pour les ventes conclues postérieurement au 1er  novembre 2006. En l’occurrence, les juges ont pu rappelé que la loi ne sanctionne pas l’absence dudit diagnostic par la nullité de la promesse (CA Rouen, 1re ch., 18 mai 2011, n° 10/02832). Le présent arrêt est intéressant en ce qu’il souligne que même pour les ventes intervenues après le 1er novembre 2006, l’absence de diagnostic de performance énergétique n’entraîne pas la nullité de la vente. La cour de cassation constate en l’occurrence que les acquéreurs avaient signés l’acte authentique sans émettre la moindre réserve, renonçant ainsi à se prévaloir de l’irrégularité de la vente. Si l’arrêt de la cour de cassation peut être surprenant au premier abord, il est en tout état de cause empreint d’une certaine logique puisque l’on peut constater que la cour d’appel puis la cour de cassation avaient pu relever que les acquéreurs ne soulevaient à aucun moment le fait que l’objet de la vente avait été substantiellement modifié par les documents remis après la vente… ce qui aurait pu changer le sens de la décision! Me Aurélien BOUDEWEEL Green Law Avocat

Des précisions quant au contenu du DPE pour les centres commerciaux

L’arrêté du 18 avril 2012 relatif au diagnostic de performance énergétique (DPE) pour les centres commerciaux existants proposés à la vente ou à la location en France métropolitaine publié au JO le 28 avril dernier apporte des précisions bienvenues quant au diagnostic par les articles R. 134-1 à 5 du Code de la Construction et de l’Habitation. Il vient définir le contenu du modèle proposé pour la réalisation du diagnostic de performance énergétique, à l’instar des 2 arrêtés du 8 février 2012 relatifs au DPE pour les bâtiments existants proposés à la vente ou à la location s’agissant des maisons individuelles. Cet encadrement de la méthodologie participe de l’objectif tenant à l’amélioration de la fiabilité du DPE que c’est fixé le Gouvernement et dont se fait l’échos le site du Ministère de l’écologie.

DPE : attention à la responsabilité du diagnostiqueur de performance énergétique !

Un arrêt récent rendu par la chambre commerciale de la Cour d’appel d’Angers le 13 décembre 2011 illustre le courant jurisprudentiel actuel tendant au renforcement de la responsabilité des professionnels notamment au niveau des diagnostics immobiliers (Cour_d’appel,_Angers,_Chambre_commerciale,_13 décembre 2011, n°10/02273, n° Juris-Data 2011-031787).   Un diagnostic manifestement erroné Dans cette espèce, les demandeurs avaient acquis de particuliers un ancien local professionnel réaménagé en immeuble à usage d’habitation. Le diagnostic de performance énergétique (DPE) relatif à ce bâtiment faisait état de frais énergétiques modérés pour le chauffage, à savoir une estimation annuelle à hauteur de 960 € TTC. Or, les acheteurs se sont rapidement trouvés confrontés à la difficulté de chauffer leur habitation à plus de 18 degrés ainsi qu’à un coût particulièrement élevé de chauffage. Etonnés de cette situation au vu du diagnostic qui leur avait été remis, ils ont alors fait appel à une autre société aux fins de faire réaliser un second DPE. Celui-ci a estimé le coût annuel du chauffage à hauteur de 5.689 €uros et relevé une isolation insuffisante voire inexistante de plusieurs parties de l’immeuble. Sur ce fondement, les acquéreurs ont donc assigné en référé les vendeurs, le diagnostiqueur technique et le notaire aux fins d’obtenir une expertise judiciaire. Celle-ci a été diligentée et l’expert judiciaire a mis en évidence l’absence totale d’isolation thermique de la maison à usage d’habitation et a évalué le montant des travaux de reprise à la somme conséquente de 195.515, 24 €uros. Les acheteurs ont dès lors introduit une action en responsabilité à l’encontre des différentes parties à l’expertise.   Une défense du diagnostiqueur axée sur les limites de sa mission Outre le débat relatif à la qualité de constructeur du particulier vendant, après réalisation de travaux d’envergure, un immeuble et celui relatif à la responsabilité du notaire en raison de l’absence de mention dans l’acte de vente de la souscription ou non d’une assurance dommages ouvrage et ce alors qu’il avait lui-même connaissance de l’ampleur des travaux effectués, s’est posée la question de la responsabilité du diagnostiqueur dans le cadre de l’élaboration de son diagnostic. En effet, et rappelons le, un tiers à un contrat peut parfaitement invoquer un manquement contractuel de l’une des parties cocontractante dès lors que celui-ci est à l’origine ou a participé à la réalisation de son préjudice. C’est bien évidemment ce qu’ont argué les acheteurs qui précisaient qu’ils n’auraient pas acquis la maison si le montant réel de la dépense énergétique leur avait été fourni. La société chargée du diagnostic soutenait, quant à elle, qu’elle n’avait commis aucune faute dans le cadre de l’élaboration du DPE dès lors qu’elle ne devait pas effectuer de démontage ou d’investigations destructrices et qu’elle ne procédait qu’à un simple examen de visu. Elle précisait que seule l’attitude des vendeurs, qui leur aurait caché volontairement la situation énergétique du bien, serait à l’origine de la difficulté. Il convient en effet de préciser que la production par ces derniers, durant les opérations d’expertise, des factures relatives aux frais énergétiques, révélait une consommation énergétique largement supérieure à celle mentionnée dans le diagnostic établi. Le diagnostiqueur estimait donc qu’il ne pouvait lui être reproché aucun manquement contractuel étant simplement tenu d’indiquer les composants et caractéristiques essentielles du bâtiment d’après son aspect visuel.   Une défense pertinente mais non adaptée aux faits de l’espèce. De tels moyens s’avèrent assurément pertinents s’agissant d’un litige portant sur la responsabilité d’un diagnostiqueur immobilier. En effet, que ce soit dans le cadre du diagnostic amiante, du constat de risque d’exposition au plomb, de l’état relatif à la présence de termites…, il s’agit le plus souvent d’un argumentaire développé par le professionnel incriminé, et suivi par les juridictions. Il convient alors de se reporter aux règles de l’art afférentes à chaque diagnostic (fixées par décret, guide de recommandations, pratiques…) et de constater que la mission du professionnel est encadrée dans certaines limites. Ainsi, un diagnostiqueur amiante ne peut être tenu pour responsable de toute présence d’amiante non détectée dès lors qu’il n’est également pas tenu de réaliser des sondages destructifs. Cependant, et en l’espèce, les juges de première instance, suivis en cela par la Cour d’appel, n’ont pas été sensibles à cet argumentaire. Et pour cause…il semble que le diagnostiqueur n’ait pas respecté les termes de sa mission, et ce indépendamment de la réalisation ou non d’investigations destructrices. La juridiction a ainsi pris le soin de relever que le second diagnostiqueur intervenu n’avait, lui-même, pas réalisé de sondage destructif et qu’il avait néanmoins abouti à une estimation de calcul des frais énergétiques radicalement différente et supérieure par rapport à celle mentionnée par la société assignée dans son DPE. De même, l’examen des factures énergétiques des vendeurs démontrait l’évaluation dérisoire et en contradiction avec la réalité effectuée par le diagnostiqueur mis en cause. Par ailleurs, il résultait du rapport d’expertise que la simple visite des combles par l’expert judiciaire avait suffi  pour qu’il soit mis en exergue une absence totale d’isolation thermique de l’immeuble à usage d’habitation. Ainsi, il ressort de ces éléments qu’un simple constat visuel ainsi qu’une demande de communication des informations nécessaires auprès des vendeurs auraient permis d’établir une estimation de la consommation énergétique plus réaliste. De surcroît, les juges d’appel ajoutent que, quand bien même seules des investigations  destructrices auraient permis de réaliser un diagnostic fiable, il appartenait alors au diagnostiqueur d’attirer l’attention, dans son rapport, sur les limites de sa mission et leur impact sur les conclusions présentées. On trouve ici la fameuse référence à l’obligation de conseil du professionnel, qui permet d’étendre sa responsabilité, au-delà même des limites de sa mission. Enfin, et s’agissant du préjudice et de son lien de causalité, la Cour d’appel d’Angers réforme la décision des juges de première instance et estime que l’obligation de réparation du diagnostiqueur à l’égard de l’acquéreur ne peut être limité à une simple perte de chance. Il doit donc être tenu solidairement avec les vendeurs et le notaire de la réparation de l’entier préjudice, le partage de responsabilité devant par la suite…