Photovoltaïques/ contrat de crédit affecté : la banque ne peut se défaire de ses obligations !

Par Maître Aurélien BOUDEWEEL (Green Law Avocats) Par un arrêt en date du 9 juillet 2015 (Cour d’appel de LIMOGES, 9 juillet 2015, RG n°15/00020), la Cour d’appel de LIMOGES confirme le jugement de première instance qui prononce la nullité du contrat de fourniture et d’installation photovoltaïques et du contrat de crédit signé par les particuliers pour financer leur installation photovoltaïque. Rappelons que le crédit affecté est celui qui est consenti par un organisme de crédit à un consommateur lors de la conclusion d’un contrat de vente ou prestation de services afin de financer cette opération commerciale. Le contrat dit principal (de vente et fournitures de panneaux photovoltaïques en l’espèce) et le contrat de crédit dit affecté sont interdépendantes aux termes des articles L. 311-20 à L. 311-28 du code de la consommation En l’espèce, des particuliers avaient contracté auprès d’une société la livraison et la pose d’un système solaire photovoltaïque. L’acquisition s’est opérée au moyen d’un contrat de crédit affecté. Sur le plan juridique, les particuliers avaient assigné la société, installatrice de panneaux photovoltaïques et la banque en vue de faire reconnaître la nullité du contrat de vente de panneaux photovoltaïques et du contrat de crédit y afférent. Saisi du litige, la juridiction de premier degré avait prononcé la nullité du contrat de vente et consécutivement du contrat de financement au regard de l’interdépendance des deux contrats. L’exécution provisoire avait été ordonnée par la juridiction. La banque avait relevé appel du jugement rendu et avait saisi le Premier Président de la Cour d’appel d’une demande de suspension de l’exécution provisoire ordonnée au titre de l’article 524 du Code de procédure civile, soit la condamnation de la banque à rembourser les sommes versées par les particuliers au titre du contrat de crédit affecté. La Cour d’appel de LIMOGES confirme cette appréciation en jugeant : « Un jugement du tribunal d’instance de Tulle du 13 avril 2015 a, notamment, condamné la société X Banque à restituer aux époux Y… l’intégralité des sommes versées au titre du contrat de crédit affecté au contrat de fourniture et d’installation de panneaux photovoltaïques déclaré nul, avec exécution provisoire de la décision et au paiement d’une indemnité de 1. 000 euros en application des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile. La société X Banque, qui a relevé appel le 19 mai 2015, a saisi le premier président d’une demande de suspension de l’exécution provisoire par assignation délivrée le 5 juin 2015 à Monsieur et Madame Y… et à titre subsidiaire d’un aménagement de l’exécution provisoire par la désignation d’un séquestre des sommes allouées au titre de l’exécution provisoire. A l’appui de sa demande, elle expose que l’exécution de la décision rendue présente un risque de conséquences manifestement excessives (…) Attendu que l’article 524 du Code de procédure civile édicte que le premier président, statuant en référé, ne peut arrêter l’exécution provisoire, en cas d’appel que si elle risque d’entraîner des conséquences manifestement excessives. Attendu, au cas d’espèce, que la société X Banque n’établit pas l’existence et l’étendue des difficultés auxquelles se heurteraient les époux Y… au cas où ils devraient rembourser le montant de la condamnation ; qu’elle n’évoque pas de conséquences manifestement excessives que l’exécution de la condamnation à payer la somme d’environ 12. 000 euros risquent d’entraîner pour elle, notamment au regard de ses facultés de paiement. Attendu qu’ainsi, le risque de conséquences manifestement excessives, nécessaire à l’arrêt de l’exécution provisoire, n’est pas démontré. Attendu par ailleurs que la crainte par la société X Banque de la non restitution des sommes versées en exécution de la condamnation ne suffit pas à fonder une demande d’aménagement de l’exécution provisoire par la désignation d’un séquestre, alors qu’aucun élément ne vient corroborer son inquiétude ». Cet arrêt de la Cour d’appel de LIMOGES rappelle que la décision de suspension de l’exécution provisoire d’un jugement au titre de l’article 524 du Code de procédure civile n’est pas acquise au visa du seul risque allégé d’impossibilité de récupérer les sommes versées en cas de réformation de la décision judiciaire. Rappelons que la demande de suspension de l’exécution provisoire est prévue par l’article 524 du code de procédure civile qui dispose : « Lorsque l’exécution provisoire a été ordonnée, elle ne peut être arrêtée, en cas d’appel, que par le premier président statuant en référé et dans les cas suivants : 1° Si elle est interdite par la loi ; 2° Si elle risque d’entraîner des conséquences manifestement excessives ; dans ce dernier cas, le premier président peut aussi prendre les mesures prévues aux articles 517 à 522 (…)». La juridiction apprécie souverainement l’existence de ce risque (Cass. soc., 8 déc. 2009, n°08-19.523). La jurisprudence admet que la preuve du risque des conséquences excessives de l’exécution provisoire peut résulter des documents comptables et/ou de tous autres éléments permettant de démontrer l’impossibilité pour le bénéficiaire de l’exécution provisoire de rembourser les sommes qui lui ont été versées L’arrêt de la Cour d’appel de LIMOGES confirme une jurisprudence de plus en plus etnette  tendant à sanctionner les organismes de crédit (professionnels) associés à des entreprises lors de la conclusion de contrat de vente hasardeux et contraires à la réglementation du Code de la consommation. Surtout, l’arrêt rappelle que les banques ne peuvent se dégager de leur responsabilité en cas de condamnation prononcée. On ne peut que se féliciter de cet arrêt rendu puisqu’il permet à des particuliers de pouvoir récupérer les sommes versées au titre du contrat de crédit affecté à la suite de la constatation de la nullité du contrat de vente principal. Les banques doivent donc répondre de leurs actes et ne sauraient se dégager de leurs obligations, même en cas d’appel formé contre un jugement qui leur est défavorable.    

Photovoltaïque/ contrat de crédit affecté : l’obligation de vigilance de la banque avant le déblocage des fonds

Par Aurélien BOUDEWEEL Green Law Avocat Par un arrêt en date du 26 mars 2015 (Cour d’appel de NIMES, 26 mars 2015, RG n°13/000986), la Cour d’appel de Nimes confirme le jugement de première instance qui prononce la nullité du contrat de crédit signé par les particuliers pour financer leur installation photovoltaïque dès lors que la résiliation amiable du contrat principal est constatée. Rappelons que le crédit affecté est celui qui est consenti par un organisme de crédit à un consommateur lors de la conclusion d’un contrat de vente ou prestation de services afin de financer cette opération commerciale. Dans ce contrat, une double relation contractuelle se noue entre le professionnel, l’établissement de crédit et le consommateur : – Un premier contrat, dit contrat principal, est conclu entre le professionnel et le consommateur, – Une autre relation contractuelle se noue entre le consommateur et l’établissement de crédit. Ces deux relations contractuelles sont interdépendantes aux termes des articles L. 311-20 à L. 311-28 du code de la consommation. En l’espèce, des particuliers avaient contracté auprès d’une société la livraison et la pose d’un système solaire photovoltaïque. L’acquisition s’est opérée au moyen d’un contrat de crédit affecté. Sur le plan juridique, les particuliers avaient assigné la société, installatrice de panneaux photovoltaïques et la banque en vue d’obtenir l’annulation ou la résolution du contrat de crédit. Saisi du litige, la juridiction de premier degré avait prononcé la nullité du contrat de financement. La Cour d’appel confirme cette appréciation en jugeant : « Les fonds ont été versés pour le compte des époux X… le 17 mars 2009 par la société Groupe Sofemo à la société BSP Groupe VPF qui lui en a donné quitus, au vu de l’attestation de « livraison-demande de financement » signée le 12 mars 2009 par l’un des époux X… mentionnant une formule pré-imprimée selon laquelle ” le bien ou la prestation, objet de de l’offre préalable de. référencée ci-dessus a été livré ou exécuté, conformément aux références portées sur l’offre préalable, sur le bon de commande et/ ou la facture “. Cette attestation signée par l’un des emprunteurs le 12 mars 2009- soit moins de quinze jours après la signature de l’offre et 5 jours après l’expiration du délai de réflexion n’était pas suffisamment précise, ne comportant pas toutes les informations nécessaires, pour rendre compte de la complexité de l’opération financée et ainsi lui permettre de s’assurer de l’exécution complète du contrat principal. En se libérant totalement des fonds au seul vu de cette attestation et d’une facture BSP Groupe VPF, sans procéder préalablement aux vérifications nécessaires, auprès des époux X…, ce qui lui aurait permis de constater que si les panneaux photovoltaïques avaient été livrés le 12 mars 2009, expliquant la signature de M. X… au bas de l’attestation, ils n’étaient pas posés dans l’attente de la suite à donner à leur déclaration de travaux déposée en mairie de Mérindol, la société Groupe Sofemo a commis une faute la privant du remboursement du capital emprunté. Enfin, aucun grief ne peut être retenu à l’encontre de M. Mustapha X… et Mme Karima Y… , dès lors que -l’attestation de « livraison-demande de financement » n’est pas assez explicite quant à l’exécution effective des travaux commandés, l’emprunteur pouvant de bonne foi signer l’attestation à la livraison des différents matériels ; – le courrier du 16 mars 2009 qui leur a été adressé par Sofemo évoque l’enregistrement de leur demande de financement et la mise en place du dossier mais non de manière précise et claire, le versement effectif à la société BSP Groupe VPF de la somme de 28 000 €, – la société BSP Groupe VPF a récupéré les dix modules livrés à leur domicile, leur a indiqué qu’elle procédait à l’annulation de leur dossier tant auprès de ses partenaires que des services fiscaux et n’a jamais prétendu-et pour cause, les attestations produites par les intimés confirmant que les panneaux photovoltaïques n’ont jamais été posés sur le toit de leur habitation-comme elle s’y emploiera avec Sofemo que les panneaux photovoltaïques avaient été installés le 12 mars 2009 et retirés avec remise en état du toit le 24 septembre 2010 ». Cet arrêt de la Cour d’appel de NIMES rappelle l’interdépendance du contrat principal et du contrat de crédit affecté. Surtout, il confirme un courant jurisprudentiel constant en la matière qui souligne que l’obligation de l’emprunteur de rembourser le prêt d’argent ne commence qu’avec la livraison de la marchandise ou l’exécution de la prestation (Cass. 1re civ., 7 janv. 1997 : Contrats, conc. consom. 1997, comm. 86. – Cass. 1re civ., 7 févr. 1995 : Contrats, conc. consom. 1995, comm. 166. – CA Douai, 8 sept. 1994 : Rev. huissiers 1995, p. 116). La Cour d’appel de NIMES confirme une jurisprudence, tendant à sanctionner les organismes de crédit (professionnels) peu scrupuleux dans la vérification, pourtant obligatoire, de la régularité et conformité du contrat principal (contrat de vente) duquel il dépend. Surtout, l’arrêt rappelle que ces derniers ne doivent pas se libérer de toute responsabilité par la simple production d’une attestation de fin de travaux pré-remplie et/ou peu explicite. Au-delà de la confirmation du régime protecteur dont bénéficie ainsi le consommateur dans le cadre de la conclusion du contrat de crédit affecté, il est impératif que les particuliers restent vigilants face à des professionnels lors de la signature de contrats ou autres attestations.

Installations photovoltaïques/ contrat de crédit affecté : une interdépendance confirmée et non sans conséquences.

Par Maître Aurélien BOUDEWEEL (Green Law Avocat) Par un arrêt en date du 12 mars 2015 (Cour d’appel de LIMOGES, 12 mars 2015, RG n°14/00068), la Cour d’appel de LIMOGES censure un jugement de première instance et prononce l’annulation du contrat de crédit signé par les particuliers pour financer leur installation photovoltaïque dès lors que l’annulation du contrat principal est constatée. Cet arrêt de la Cour d’appel confirme donc un courant jurisprudentiel dont nous nous étions fait l’écho dans un précédent article (cf. notre article du 14 avril 2014 sur l’arrêt de la Cour d’appel de LIMOGES du 24 janvier 2014 : RG n°12/01358), En l’espèce, des particuliers avaient contracté auprès d’une société se revendiquant spécialisée dans la fourniture et la pose d’un système solaire photovoltaïque. L’acquisition s’est opérée au moyen d’un contrat de crédit affecté. Sur le plan juridique, les particuliers ont fait valoir que l’ensemble des travaux n’avaient pas été exécutés et qu’il existait des irrégularités du bon de commande au visa des dispositions du code de la consommation. Saisi du litige, la juridiction de premier degré avait débouté les particuliers de leurs demandes d’annulation et les avait condamnés à rembourser le contrat de crédit auprès de l’établissement bancaire. La Cour d’appel de LIMOGES censure cette appréciation en jugeant : « Il est produit un bon de commande aux noms de ERG, M. X… et Mme A…, une ” attestation de mandat ” X…- ERG (apparaissant signée aussi A…) et un contrat de prêt SA Z-M. X… et Mme A…. Ces documents sont en date du 25 août 2010. Le bon de commande mentionne : fait à Eyburie, le contrat de prêt indique : date d’acceptation 25/ 08/ 2010 à Eyburie. Eyburie est la commune du domicile de M. X…. Le bon de commande se réfère expressément aux articles L 121-23/ 24/ 25/ 26 du code de la consommation. Il s’en déduit que M. X… a fait l’objet d’un démarchage à domicile. Si le mandat conclu en l’occurrence accessoirement au contrat principal n’est pas lui-même soumis directement aux règles des articles L 121-23 à 26 du code de la consommation, celles-ci s’appliquent en revanche au bon de commande constituant le contrat principal. Il est produit uniquement (par l’appelant comme par la SA Z) le recto du bon de commande. Ce recto fait état d’un verso. Il est certes pré-imprimé que le signataire reconnait avoir pris connaissance des dispositions des articles L 121-23, L121-24, L 121-25, L 121-26 du code de la consommation et des conditions générales de vente figurant au verso, mais l’absence de production du verso ne permet pas à la juridiction de vérifier elle-même comme il lui appartient de le faire si le contrat mentionne bien, de façon apparente, le texte intégral de ces dispositions. Et cette mention ne justifie pas non plus elle-même suffisamment de la reproduction desdits articles. Il y a donc là une cause de nullité, vu le début de l’article L 121-23 du code de la consommation. Le prêt était un crédit affecté à la prestation objet du bon de commande précité. En application de l’article L 311-32 du code de la consommation, ce crédit est donc lui-même de plein droit annulé. En raison de la faute du prêteur de n’avoir pas vérifié la conformité du contrat principal de son partenaire, M. Y…, à la législation sur le démarchage à domicile puisqu’il apparaît qu’il n’a eu à sa disposition que le recto du bon de commande et donc un document incomplet, la SA Z sera déboutée de sa demande en paiement et il ne sera pas ordonné de restitution à la charge de M. X… consécutivement à l’annulation du prêt». Cet arrêt de la Cour d’appel de LIMOGES rappelle l’interdépendance du contrat principal et du contrat de crédit affecté et l’annulation automatique du contrat de crédit lorsque l’annulation du contrat principal est prononcée. A noter que la loi n°2014-344 du 17 mars 2014 a réformé plusieurs dispositions du code de la consommation intéressant les opérations de démarchage. On retiendra que le nouvel article L111-1 I du code de la consommation impose même des obligations plus étendues à la charge du professionnel puisque ce dernier doit informer le consommateur les informations suivantes : • Les caractéristiques essentielles du bien ou du service. Il est précisé que cette information doit être faite en fonction du support de communication utilisé : on ne donne pas autant de détail sur les caractéristiques du bien si celui-ci est exposé en vitrine ou si la commande se fait par téléphone ; • Le prix du bien ou du service selon les modalités de l’article L. 113-3 qui n’a pas été modifié ; • La date ou le délai dans lequel le professionnel livrera le bien ou exécutera le service ; • L’identification du professionnel, un décret en Conseil d’État fixe les éléments de cette identification. Ces informations doivent être données au consommateur avant la conclusion du contrat. On rappellera qu’aux termes de l’article L212-21 du Code de la consommation le consommateur dispose dorénavant d’un délai de quatorze jours pour exercer son droit de rétractation d’un contrat conclu à distance, à la suite d’un démarchage téléphonique ou hors établissement, sans avoir à motiver sa décision. L’arrêt de la Cour d’appel de LIMOGES confirme une jurisprudence de plus en plus ferme et tendant à sanctionner les organismes de crédit (professionnels) peu scrupuleux dans la vérification, pourtant obligatoire, de la régularité et conformité du contrat principal (contrat de vente) duquel il dépend. Le consommateur qui est confronté à la disparition de la société auprès de laquelle il a contracté (liquidation ou redressement judiciaire) ne doit donc pas oublier qu’une porte de sortie existe dans le règlement de son litige en cas de conclusion d’un contrat de crédit affecté.