Bornes de recharge électrique sur les autoroutes : un décret pour accélérer leur déploiement

Par Maitre David DEHARBE (Green Law Avocats) Compte tenu des impératifs liés à la transition écologique et afin d’accélérer le déploiement des points de recharge pour véhicules électriques sur le réseau autoroutier, le Décret n° 2021-1177 du 10 septembre 2021 (JORF n°0213 du 12 septembre 2021)  prévoit, par dérogation aux articles R. 122-41 et suivants du code de la voirie routière, la possibilité pour les sociétés concessionnaires d’autoroutes n’ayant pas la qualité de pouvoir adjudicateur de sélectionner les titulaires des contrats d’exploitation portant exclusivement sur l’installation et l’exploitation de points de recharge pour véhicules électriques au terme d’une procédure de publicité et mise en concurrence adaptée. Cette procédure concerne les contrats dont la valeur estimée est inférieure au seuil applicable aux contrats de concession mentionné au II de l’annexe 2 du code de la commande publique (soit 5 350 000 € HT ). Les investissements en matière de déploiement d’infrastructures de recharge pour véhicules électriques portés par les titulaires des contrats sélectionnés dans le cadre de la procédure adaptée sont éligibles à l’aide prévue par la loi de finances pour 2021, dont la gestion est confiée à l’Agence de services et de paiements. Enfin, le décret étend les obligations relatives à la modération tarifaire aux sources d’énergies usuelles au sens de l’article D. 122-46-1 du code de la voirie routière et prévoit des conditions d’entrée en vigueur aménagées concernant la distribution d’énergie électrique pour la recharge des véhicules.

Performances énergétiques: la loi ELAN refonde le dispositif « tertiaire » et annonce un nouveau décret

Par Lucas DERMENGHEM, Avocat, Green Law Avocats Souvenons-nous : à l’aube de l’été dernier, le Conseil d’Etat (CE, 18 juin 2018, n°411583, Conseil du commerce de France e.a) annulait le décret n°2017-918 du 9 mai 2017 relatif aux obligations d’amélioration de la performance énergétique dans les bâtiments à usage tertiaire, dit décret « tertiaire », texte dont l’exécution avait dans un premier temps été suspendue par le juge des référés de la Haute Assemblée. Ce décret avait pour objet la mise en application de l’article L. 111-10-3 du code de la construction et de l’habitation, lequel prévoit : « Des travaux d’amélioration de la performance énergétique sont réalisés dans les bâtiments existants à usage tertiaire ou dans lesquels s’exerce une activité de service public dans un délai de huit ans à compter du 1er janvier 2012 ». Il était ainsi prévu qu’au 1er janvier 2020, les propriétaires de bâtiments de bureaux, d’hôtels, de commerces, d’enseignement et de bâtiments administratifs de plus de 2000 m² de surface utile devaient réaliser des travaux permettant de réduire leurs consommations énergétiques de plus de 25% par rapport à la dernière consommation énergétique connue, ou à hauteur d’un seuil exprimé en kWh/m²/an. C’est en vertu du principe de sécurité juridique que le Conseil d’Etat avait prononcé l’annulation du décret, au regard notamment du délai trop court laissé aux obligés : « […] qu’ainsi, compte tenu, d’une part, du délai nécessaire à la réalisation des études énergétiques et plans d’actions et, d’autre part, du délai nécessaire, à compter de l’élaboration de ces documents, pour entreprendre les actions et réaliser les travaux nécessaires pour atteindre, d’ici au 1er janvier 2020, les objectifs de réduction des consommations d’énergie fixés à l’article R. 131-39, les associations requérantes sont fondées à soutenir que le décret attaqué méconnaît le principe de sécurité juridique ; qu’au regard du vice dont le décret est entaché, qui affecte, compte tenu de l’objectif de réduction de la consommation énergétique d’ici au 1er janvier 2020 fixé par le législateur et des particularités du dispositif mis en place, son économie générale et son séquençage temporel, il y a lieu d’annuler le décret dans sa totalité, sans qu’il soit besoin d’examiner les autres moyens de la requête ; » On pouvait craindre que cette annulation juridictionnelle sonne le glas des obligations d’amélioration de la performance énergétique dans les bâtiments à usage tertiaire. Mais par son article 175, la loi n°2018-1021 du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l’aménagement et du numérique, dite loi « ELAN », est venue refonder le socle législatif de ces obligations en modifiant l’article L. 111-10-3 du code de la construction et de l’habitation, et prévoir l’édiction prochaine d’un nouveau décret « tertiaire ». Cette nouvelle rédaction, nettement plus détaillée, intéressera le lecteur à plusieurs égards. Tout d’abord, on relèvera qu’a disparu la notion de « travaux », chère à l’ancienne rédaction de l’article L. 111-103 issue de la loi Grenelle 2. La loi ELAN évoque désormais des « actions de réduction de la consommation d’énergie finale ». Le texte se veut ici plus réaliste en n’intégrant plus seulement les économies réalisées grâce aux travaux en « dur » mais également la maintenance des équipements ou encore la sensibilisation des occupants des bâtiments. Autre modification majeure : si la loi ELAN maintient l’exigence prévue par la loi de transition énergétique de diminution de la consommation d’énergie de 40% en 2030, 50% en 2040 et 60% en 2050, sur la base de l’année 2010, elle repousse à 2030 la première échéance de l’obligation de réduction de la consommation d’énergie dans les bâtiments tertiaires et supprime donc en conséquence l’ancienne obligation de réduction de 25% prévue pour 2020. Il s’agit ici d’une conséquence directe de l’annulation juridictionnelle opérée par le Conseil d’Etat qui a jugé que l’échéance de 2020 était trop proche pour pouvoir être respectée compte tenu de la date de publication de l’ancien décret « tertiaire », en mai 2017. Ensuite, le nouveau dispositif issu de la loi ELAN se caractérise par une certaine souplesse. Ainsi, la loi fixe des objectifs de réduction alternatifs : il est ainsi prévu que tout bâtiment, partie de bâtiment ou ensemble de bâtiments soumis à l’obligation de réduction atteigne, pour chacune des années 2030, 2040 et 2050, les objectifs suivants : Soit un niveau de consommation d’énergie finale réduit, respectivement de 40%, 50% et 60% par rapport à une consommation énergétique de référence qui ne peut être antérieure à 2010 ; Soit un niveau de consommation d’énergie finale fixé en valeur absolue, en fonction de la consommation énergétique des bâtiments nouveaux de leur catégorie. De plus, la loi ELAN a assorti ces objectifs de possibilités de modulation, en fonction : Soit de contraintes techniques, architecturales ou patrimoniales ; Soit d’un changement de l’activité exercée dans ces bâtiments ou du volume de cette activité ; Soit de coûts manifestement disproportionnées des actions par rapport aux avantages attendus en termes de consommation d’énergie finale. La souplesse du dispositif se caractérise également par le fait que la chaleur fatale autoconsommée par les bâtiments (par exemple la chaleur diffusée par les serveurs informatiques) peut être déduite de la consommation et que la consommation d’énergie liée à la recharge de véhicules électriques et hybrides rechargeables est déduite de la consommation énergétique du bâtiment et ne rentre pas dans la consommation de référence. Le dispositif crée par la loi ELAN se distingue en outre par les obligations mises à la charge des propriétaires et preneurs à bail des bâtiments ou parties de bâtiments concernés. Il est prévu que ceux-ci soient soumis à l’obligation d’amélioration de la performance énergétique « pour les actions qui relèvent de leur responsabilité respectives en raison des dispositions contractuelles régissant leurs relations ». Les bailleurs et locataires devront définir ensemble les actions destinées à respecter l’obligation de performance énergétique. Chaque partie procédera à la transmission des consommations d’énergie afin que soit assuré le suivi du respect de leurs obligations. Ces informations devront être transmises d’ici le 1er janvier 2020, par le biais d’une plateforme informatique devant être instituée par décret, ce qui supposera vraisemblablement la réalisation d’audits énergétiques d’ici cette échéance. L’évaluation du respect des…