Distribution d’eau: condamnation d’un distributeur pour limitation du débit d’eau
Par Aurélien Boudeweel – Green Law Avocats Par une ordonnance de référé en date du 15 janvier 2016, le tribunal d’instance de PUTEAUX condamne une société de distribution d’eau pour réduction illicite du débit d’eau potable. Nous nous étions déjà fait l’écho de condamnations de compagnies d’eau pour coupure illégale (cf notre article en date du 31 octobre 2014, ici) En l’espèce, le distributeur d’eau avait, dans le litige soumis au Tribunal d’instance, non pas coupé l’eau mais réduit le débit d’eau d’une famille qui avait un impayé de facture de 400 euros. Rappelons que l’article L115-3 du Code de l’action sociale et des familles prévoit : « Dans les conditions fixées par la loi n° 90-449 du 31 mai 1990 visant à la mise en œuvre du droit au logement, toute personne ou famille éprouvant des difficultés particulières, au regard notamment de son patrimoine, de l’insuffisance de ses ressources ou de ses conditions d’existence, a droit à une aide de la collectivité pour disposer de la fourniture d’eau, d’énergie et de services téléphoniques dans son logement. En cas de non-paiement des factures, la fourniture d’énergie, d’eau ainsi que d’un service téléphonique restreint est maintenue jusqu’à ce qu’il ait été statué sur la demande d’aide ». Dans le cadre du litige qui lui était soumis, la tribunal d’instance de PUTEAUX fait application de cette disposition et condamne le distributeur d’eau: «Aux termes de l’article L115-3 du Code de l’cation sociale et des familles « dans les conditions fixées par la loin ° 90-449 du 31 mai 1990 visant à la mise en œuvre du droit au logement, toute personne ou famille éprouvant des difficultés particulières, au regard notamment de son patrimoine, de l’insuffisance de ses ressources ou de ses conditions d’existence, a droit à une aide de la collectivité pour disposer de la fourniture d’eau, d’énergie et de services téléphoniques dans son logement. (…) Du 1er novembre de chaque année au 31 mars de l’année suivante, les fournisseurs d’électricité, de chaleur, de gaz ne peuvent procéder, dans une résidence principale, à l’interruption, y compris par résiliation de contrat, pour non-paiement de factures de la fourniture d’électricité, de chaleur ou de gaz aux personnes ou familles(…). Il résulte de l’application de ces textes qu’en tout état de cause, l’interruption de la fourniture d’eau est interdite pour une résidence principale en cas d’impayés et ce, toute l’année. Or, les sociétés X et Y ne peuvent se prévaloir de l’application d’une disposition d’un règlement de service qui prévoit l’interruption de l’alimentation en cas d’impayés pour contrevenir à leurs obligations légales (…). Force est de constater que la mise en place d’un débit réduit par le biais de la pose de cette lentille aboutit aux mêmes conséquences qu’une coupure d’alimentation d’eau de sorte que cette pratique doit être assimilée à une interruption de la fourniture d’eau (…). Dès lors, il convient de relever que la mise ne place de cette lentille constitue un trouble manifestement illicite constitué par le non-respect des termes de l’article L115-3 du Code de l’action sociale et des familles, qu’il convient de faire cesser (…) ». En condamnant le distributeur d’eau, le tribunal d’instance souligne le droit fondamental de toute personne à l’eau. Le jugement rendu par la juridiction civile est l’occasion de mettre en lumière la disposition de l’article L115-3 du Code de l’action sociale et des familles. Aux termes de cet article, rappelons: Ø Que toute personne, en cas de non-paiement de ses factures d’eau consécutives à des difficultés financières à le droit d’obtenir de l’aide de la collectivité publique pour disposer du maintien de la fourniture d’eau et le distributeur doit dès lors maintenir son service. Ø A défaut, toute personne a le droit de réclamer un plan d’apurement de sa dette auprès du fournisseur qui ne peut alors interrompre la fourniture en cas de respect des modalités de règlement convenus entre les parties. Ø En tout état de cause, la juridiction saisie d’un litige appréciera la bonne foi du particulier. L’article L115-3 du code de l’action sociale et des familles s’applique à l’ensemble des distributeurs de fourniture d’eau mais également aux distributeurs d’énergie et de services téléphoniques. Notons que le jugement rendu est très intéressant puisque la juridiction civile condamne la société de distribution d’eau non pas pour avoir coupé l’eau mais pour en avoir réduit le débit. Consciente que cette société a voulu contourner les termes de la réglementation, le Tribunal d’instance de PUTEAUX assimile la réduction du débit à une coupure afin de sanctionner le comportement empreint de malice de la société de distribution d’eau.