Délai pour contester le 2nd tour des municipales : vendredi 3 juillet !

Par Maître David DEHARBE (Green Law Avocats) L’ordonnance n°2020-305 du 25 mars 2020 portant adaptation des règles applicables devant les juridictions de l’ordre administratif avait adopté des délais nouveaux en matière électorale. Mais cette ordonnance ne s’applique qu’au premier tour des élections municipales. En effet, l’article 15, II, 3° de l’ordonnance, dans sa version en vigueur au 30 juin 2020, dispose que « les réclamations et les recours mentionnés à l’article R. 119 du code électoral peuvent être formés contre les opérations électorales du premier tour des élections municipales organisé le 15 mars 2020 au plus tard à dix-huit heures le cinquième jour qui suit la date de prise de fonction des conseillers municipaux et communautaires élus dès ce tour ». Il n’est donc pas ici question du second tour des élections . De même, l’ordonnance n° 2020-390 du 1er avril 2020 relative au report du second tour du renouvellement général des conseillers municipaux et communautaires ne fait pas non plus état d’une dérogation au délai de recours applicable aux protestations déposées à l’encontre des résultats du second tour des élections municipales. Au demeurant comme le deuxième tour s’est déroulé après l’expiration de la « période juridiquement protégée » (période courant du 12 mars 2020 au 23 juin inclus en vertu de l’ordonnance 2020-560 du 13 mai 2020), aucune autre disposition des ordonnances qui avaient prolongé de nombreux délais de recours dans diverses matières ne trouve à s’appliquer. Dans ce contexte, le calcul du délai de protestation pour le second tour des élections municipales de 2020 demeure soumis au droit commun électoral. Les protestations doivent être déposées au plus tard à dix-huit heures le cinquième jour qui suit l’élection (art. R. 119 du code électoral) sachant que ce délai est un délai franc.  C’est la date de réception du recours qui est prise en compte pour le calcul du délai, et non celle du dépôt à la poste (CE, 26 octobre 2001, n°233290). Par conséquent, la date butoir pour déposer un recours contre le second tour des élections municipales, ayant eu lieu le dimanche 28 Juin 2020, est le vendredi 3 juillet à 18h.

Protestations électorales : feu vert !

Par Maître David DEHARBE (Green Law avocats) Les préoccupations environnementales ont marqué les élection municipales de 2020 : les coalitions menées par Europe Écologie les Verts étant élues dans les grandes villes comme Lyon, Bordeaux, Strasbourg, échouant de peu à Lille mais gagnant également des villes non négligeables comme Poitiers, Besançon ou Annecy. Notons également qu’à Marseille le suspens dure encore un peu : si la liste conduite par l’écologiste Michèle Rubirola est arrivée en tête, elle n’a qu’une majorité relative en nombre de sièges de conseillers municipaux et le Printemps marseillais doit encore obtenir le soutien de l’ancienne socialiste Samia Ghali. Reste que ce verdissement des majorités municipales dans les villes ne doit pas faire perdre de vue l’autre donnée fondamentale et inquiétante de ce scrutin municipal : le taux de participation officielle au second tour des élections municipales s’établit à 41,6 % après un premier tour avec 44,66 de participation ce qui est un record historique ! Et pour cause pendant toute l’histoire de la Vème République le taux de participation au 2ème tour des élections municipales a toujours été contenu entre 79,68 % (1983) et 62,13 % (2014)… Validant le report du second tour des municipales et les mesures prises à cet effet par ordonnances, le Conseil constitutionnel a pu juger  (CC, 17 juin 2020, n° 2020-849QPC) que ce choix de convoquer le corps électoral avant la fin du mois de juin ne favorisait pas en lui-même l’abstention, tout en précisant prudemment qu’il appartiendrait « au juge de l’élection [autrement aux tribunaux administratifs et in fine au Conseil d’Etat] d’apprécier si le niveau de l’abstention a pu ou non altérer, dans les circonstances de l’espèce, la sincérité du scrutin ». Le droit ne s’use en tout cas que si on ne s’en sert pas ! Si l’abstention entame le droit de vote et la démocratie représentative, il n’appartient qu’à ceux jugeant mal élus leurs nouveaux conseillers d’en débattre devant le juge. A ce titre, rappelons que le contentieux des élections municipales obéit à des règles spécifiques notamment pour ce qui concerne l’intérêt à agir des requérants et les délais de recours (I°) et se caractérise également par des pouvoirs importants attribués au juge (II°). I/ Règles spécifiques du contentieux des élections municipales     La compétence en premier ressort des tribunaux administratifs pour connaître de la contestation des élections municipales Comme le prévoit l’article L249 du Code électoral, c’est le tribunal administratif du lieu de l’élection qui statue en premier ressort sur la contestation des opérations électorales de la commune. Le Conseil d’Etat est quant à lui compétent pour statuer sur les recours dirigés contre la décision du tribunal administratif, ouverts au préfet ou aux parties intéressées.     L’intérêt à agir pour contester les élections municipales L’article L248 du Code électoral dispose que : « Tout électeur ou tout éligible a le droit d’arguer la nullité des opérations électorales de la commune devant le tribunal Administratif/ Le préfet, s’il estime que les conditions et les formes légalement prescrites n’ont pas été remplies, peut également déférer les opérations électorales au tribunal administratif ».  Dès lors, présentent un intérêt à agir pour contester l’élection des conseillers municipaux :     Les électeurs de la commune qui ne sont pas radiés des listes électorales au jour où ils déposent leurs réclamations (Cf. CE, 31 juillet 1996, Elections municipales de Milly-sur-Thérain, n° 172743) ;     Tout candidat à l’élection, y compris les candidats proclamés élus à leur propre élection (CE, 14 mai 1969, Elections municipales partielles de la Rivière, Lebon p. 252) ;     Le Préfet, lequel doit se fonder exclusivement sur les inobservations des conditions et des formes légalement prescrites pour l’élection (Cf. CE, 21 juin 1985, Elections d’Ambarès, Lebon p. 558). Seules des personnes physiques sont fondées à former des protestations électorales ; les recours formés par des personnes morales ne sont pas recevables. Sont ainsi exclus de la possibilité de former un recours :     Les partis politiques (Cf. CE, 17 octobre 1986, Elections cantonales de Sevran, n° 70266) ;     Les syndicats de salariés (Cf. CE, 12 mai 1978, Elections municipales de Notre Dame de Gravenchon, n° 08601) ;     Les associations (Cf. CE, 29 juillet 1998, Elections régionales d’Aquitaine, n° 195094). Par ailleurs, on soulignera que le ministère d’avocat n’est pas obligatoire en matière de contentieux des élections municipales tant devant les tribunaux administratifs que devant le Conseil d’Etat (Cf. Art. L97 du code électoral).     Précisions sur le délai Les réclamations contre les opérations électorales dans la commune doivent être consignées dans un procès-verbal, sinon être déposées à peine d’irrecevabilité, au plus tard à 18 heures le cinquième jour suivant l’élection, à la sous-préfecture, ou à la préfecture. Ces protestations sont alors immédiatement adressées au Préfet qui les fait enregistrer au greffe du tribunal administratif. Elles peuvent également être déposées directement au greffe du tribunal administratif, dans le même délai (cf. article R119 du code électoral). Ces observations doivent être signées et il est exigé du requérant qu’il exprime clairement sa volonté de saisir le juge sans se borner à critiquer le déroulement du scrutin (Cf. CE, 7 décembre 1983, Elections municipales de Briot, n° 51788). Les recours formés par le Préfet doivent être exercés dans un délai de quinzaine à dater de la réception du procès-verbal. Dans tous les cas, notification est effectuée, dans les trois jours de l’enregistrement de la protestation, auprès des conseillers dont l’élection est contestée qui sont avisés en même temps qu’ils ont 5 jours aux fins de déposer leurs défenses au greffe (bureau central ou greffe annexe) du tribunal administratif et d’indiquer s’ils entendent ou non user du droit de présenter des observations orales. A compter de l’enregistrement de la réclamation, le tribunal administratif prononce sa décision dans un délai de 2 mois, décision qui sera notifiée dans un délai de 8 jours à compter de cette date aux candidats intéressés et au préfet. Ce délai est porté à 3 mois en cas de renouvellement général (Cf. Art. R120 et R121-1 du code électoral). On notera que,…

1er tour des élections municipales faussé : peut-on le contester ?

Par Maître Lucas DERMENGHEM (Green Law Avocats) A l’heure où l’hypothèse d’un report du second tour des élections municipales fait l’objet de l’attention focalisée des médias, les opérations électorales du premier tour ont connu, non sans une grande surprise, d’importants taux d’abstentions. Plus en amont encore, la décision de maintenir ce premier tour exprimée à l’occasion de l’allocution du Président de la République du 12 mars 2020 a suscité de nombreux débats tant ce choix souffre de la comparaison avec les mesures exceptionnelles de confinement aujourd’hui envisagées sur l’ensemble du territoire. A cet égard, le Président de la République a justifié cette décision à la fois sur la base d’expertises scientifiques (au demeurant non publiées), mais en s’appuyant aussi sur la nécessité de préserver le débat démocratique. Pour autant, le maintien du premier tour des élections municipales dans de telles circonstances exceptionnelles ne met-il pas plus à mal la démocratie que son simple report ? Autrement dit, pourrait-il être considéré que le premier tour des élections municipales est d’une certaine manière faussé, et dès lors susceptible d’être contesté ? La réponse à cette interrogation suppose tout d’abord d’opérer un bref rappel opérationnel du cadre juridique relatif au contentieux des élections municipales, avant d’examiner son application à la situation très particulière du scrutin du 15 mars dernier. I – Cadre juridique du contentieux des élections municipales 1° – En ce qui concerne les délais de contestation S’agissant de la compétence juridictionnelle, l’article L248 du code électoral prévoit que « Tout électeur et tout éligible a le droit d’arguer de nullité les opérations électorales de la commune devant le tribunal administratif. », ces mêmes dispositions réservant également la possibilité d’un déféré préfectoral. Tout en réservant une grande majorité de ce contentieux au juge administratif, précisons que les juridictions judiciaires conservent une compétence, logiquement en matière pénale, ainsi qu’en matière d’inscription sur les listes électorales (voir, pour un exemple, la procédure de contestation d’une radiation des listes électorales prévue par l’article L20 du code électoral). Tout électeur et tout éligible peut donc contester les opérations électorales menées au sein de sa commune. Prenant l’appellation de « protestation électorale », cette démarche peut être consignée par procès-verbal, ou déposée directement au greffe du Tribunal administratif. En tout état de cause, elle doit être déposée au plus tard à dix-huit heures le cinquième jour qui suit l’élection (art. R119 du Code électoral), ce qui nous amène, dans notre cas, au vendredi 20 mars 2020 à 18h00 si les résultats ont été proclamés le dimanche 15 mars avant minuit. Précisons immédiatement qu’en l’état, bon nombre de contestations devront attendre la tenue et la proclamation des résultats du second tour, aujourd’hui largement débattue, puisqu’est sans objet et par suite irrecevable une protestation dirigée contre les opération électorales du premier tour qui n’ont pas conduit à une proclamation d’élus, sauf si le requérant demande au juge de proclamer un candidat ou une liste qui remplirait les conditions pour être élus dès le premier tour (CE, 25 mai 1990, Elect. Mun. Aix-En-Provence : Lebon, p. 137). 2° – L’étendue et les modalités du contrôle du juge Hors cas des actes détachables de l’opération électorale, il s’agit d’un contentieux de pleine juridiction particulier, dit « plein contentieux objectif », présentant des spécificités en termes procéduraux et de recevabilité. Autrement dit, le juge administratif ainsi saisi ne dispose pas seulement d’un pouvoir d’annulation, mais également de pouvoirs plus étendus tels la régularisation, voire la réformation. Selon une formule jurisprudentielle désormais classique, le juge, en matière de contentieux électoral, apprécie si l’irrégularité en cause « a été de nature à affecter la sincérité du scrutin et, par suite, la validité des résultats proclamés » (CE, 24 septembre 2008, n° 317786). Par conséquent, il revient au juge d’apprécier la nature et la gravité de l’irrégularité invoquée. Ainsi, toute irrégularité n’entraîne pas nécessairement annulation de l’élection, notamment si le juge considère que cette irrégularité n’a pas modifié le résultat et conduit à méconnaître la volonté des électeurs. Autrement dit, l’irrégularité doit être suffisamment grave pour avoir, à elle seule, affecté la sincérité du scrutin. 3° Application au déroulement des opérations de vote Eu égard aux circonstances dans lesquelles ont eu lieu ces opérations électorales, nous nous reporterons plus précisément, et surtout, sur les irrégularités susceptibles d’affecter le déroulement des opérations de vote. D’une manière synthétique, rappelons les modalités d’organisation des opérations de vote doivent assurer le respect de deux libertés fondamentales : – L’égalité de suffrage – La liberté de suffrage S’agissant de la liberté de suffrage, il résulte de l’ensemble des dispositions relatives à l’organisation du vote que les électeurs doivent pouvoir se déterminer en tout connaissance de cause, à l’abris d’erreurs ou de confusions. Le respect des valeurs démocratiques implique donc que chaque électeur puisse exprimer son choix librement, sans être sujet à une quelconque influence, pression ou intimidation sur les lieux. A cet égard, le code électoral comporte des dispositions pénales réprimant les atteintes portées à la liberté du vote (art. L94 à L117 du code électoral), par exemple : le fait, à l’aide de fausses nouvelles, bruits calomnieux, ou autres manœuvres frauduleuses, de surprendre ou détourner des suffrages, ou de pousser un ou plusieurs électeurs à s’abstenir de voter (art. L97 du code électoral). la liberté de suffrage implique que l’électeur ne soit soumis à aucune influence quelconque le jour du scrutin (CE, 14 mars 1984, Elec. Mun. Schoelcher) ou ne subisse aucune pression (CE, 14 av. 1984, Elec. Mun. Houilles : Lebon p. 146). La libre expression du suffrage est considérée comme une liberté fondamentale dont l’atteinte grave et manifestement illégale peut justifier l’exercice d’un référé-liberté sur le fondement de l’article L. 521-2 du CJA (voir en ce sens : CE, 11 mars 2020, n° 439434). II – Réflexions relatives au premier tour des élections municipales de 2020 Sur la base des considérations précitées, et au regard de la libre expression du suffrage qui constitue une liberté fondamentale de premier plan en vertu des articles 3 et 4 de la Constitution du 4 octobre 1958, la régularité de ce premier tour interroge. En…

La circulaire Castaner suspendue par le Conseil d’Etat !

Par Maître Lucas DERMENGHEM (Green Law Avocats) Par une ordonnance en date du 31 janvier 2020 (n°437675), le juge des référés du Conseil d’État a prononcé la suspension de l’exécution de la circulaire du 10 décembre 2019 du Ministre de l’Intérieur, dite « circulaire Castaner », relative à l’attribution des nuances politiques aux candidats aux élections municipales et communautaires des 15 et 22 mars prochains (n°INTA1931378J). Cette décision, largement relayée par la presse, rappelle d’une manière bienvenue les impératifs d’égalité de traitement entre les partis politiques, mais également d’exactitude de l’information délivrée aux pouvoirs publics et aux citoyens afin que ces derniers puissent suivre les tendances politiques locales et nationales lors d’opérations électorales. Tout d’abord, rappelons que cette circulaire du Ministre de l’Intérieur avait pour objet d’établir une « grille des nuances politiques » destinée à placer les candidats, élus ou listes, sur une grille des courants politiques afin de présenter les résultats électoraux de la manière la plus précise possible et d’offrir une représentation des tendances politiques locales et nationales. Pour ce faire, la circulaire prévoyait l’attribution d’une nuance pour les candidats et listes des seules communes d’au moins 9 000 habitants ainsi que dans les chefs-lieux d’arrondissement. En annexe de cette circulaire figurait une grille de 24 nuances politiques pour les candidats, contre 22 pour les listes, recoupées en six blocs de clivages afin d’agréger plus lisiblement les résultats (extrême gauche, gauche, autre, centre, droite, extrême droite). C’est précisément ce seuil de communes d’au moins 9 000 habitants ainsi que certaines conditions d’attribution de ces nuances qui se voyaient particulièrement contestés au titre des cinq référés-suspension et du référé-liberté introduits devant le Conseil d’État par plusieurs élus et partis politiques : A titre liminaire, précisons qu’en principe, une circulaire étant un acte interne à l’administration, tout recours juridictionnel introduit à son encontre est irrecevable, cette dernière n’étant pas un acte faisant grief. Toutefois, par exception, les circulaires dites « impératives », c’est-à-dire imposant un comportement déterminé à leurs destinataires sont susceptibles de recours juridictionnel (CE, 18 décembre 2002, Mme Duvignères, n°233618). En outre, pour qu’une circulaire soit opposable ou invocable, l’article L. 312-2 du CRPA impose que cette dernière ait fait l’objet d’une publication, permettant alors à toute personne de s’en prévaloir pour son application à une situation n’affectant pas des tiers (art. L. 312-3 CRPA). Les supports et la périodicité de publication dépendent de la qualité de l’auteur de la circulaire et sont précisés aux articles R. 312-3-1 à R. 312-6 du CRPA. Ainsi a contrario, en l’absence de publication sur l’un des supports prévus, la circulaire n’est ni opposable ni invocable et sera réputée abrogée à l’expiration d’un délai de quatre mois à compter de sa signature (art. R. 312-7 CRPA). Dans cette décision, c’est précisément le caractère très prochainement opposable de la circulaire que relève le Conseil d’État pour juger satisfaite la première condition d’admission d’un référé-suspension, à savoir l’urgence de la suspension demandée (cf. considérant n°7 de l’ordonnance). A cet égard, d’une part, la Haute-Juridiction relève que la circulaire est « de nature règlementaire », autrement dit qu’elle ajoute de nouvelles dispositions par rapport au texte dont elle explicite l’application, soit le décret n° 2014-1479 du 9 décembre 2014. D’autre part,  le Conseil d’État retient qu’à l’examen des indications délivrées par les représentants du Ministre de l’Intérieur, cette circulaire fera très prochainement l’objet d’une publication afin de permettre son application lors de l’enregistrement des candidatures aux élections municipales qui, à la date de la décision, devait débuter quelques plus tard. « Eu égard à cette échéance immédiate », le juge des référés a donc considéré que la condition d’urgence de l’article L. 521-1 du code de justice administrative était remplie. Par suite, le juge des référés examine la requête à l’aune de la seconde condition, à savoir l’existence d’un moyen propre à créer un doute sérieux quant à la légalité de l’acte dont la suspension est demandée. Sur ce point, l’ordonnance retient trois moyens :   – En premier lieu, la circulaire retient un seuil d’attribution d’une nuance politique aux candidats et listes limité aux communes d’au moins 9 000 habitants et aux chefs-lieux d’arrondissement. Le Conseil d’État relève que le choix de ce seuil a pour effet ne pas attribuer de nuance politique dans plus de 95% des communes, excluant par conséquent de la présentation nationale des résultats des élections municipales les suffrages exprimés par près de la moitié des électeurs. Le juge des référés relève en outre que le seuil de 9 000 habitants retenu par la circulaire a pour effet potentiel de ne pas prendre en considération l’expression politique manifestée par plus de 40% du corps électoral. Ce faisant, le seuil retenu compromet l’objet même de la circulaire, en ce qu’il ne permet pas de délivrer l’information la plus complète et précise possible aux pouvoirs publics ainsi qu’aux citoyens, tout en risquant de sous-estimer les principaux courants politiques du scrutin. C’est donc logiquement que le Conseil d’État considère que le moyen tiré de l’erreur manifeste d’appréciation dont serait entachée cette circulaire en tant qu’elle retient un tel seuil est propre à créer un doute sérieux sur la légalité de cet acte. – En deuxième lieu, à l’examen de la circulaire, en principe, l’investiture par un parti politique constituait une condition sine qua non d’attribution d’une nuance politique à une liste. Cependant, le texte ménageait une exception, permettant l’attribution de la nuance « divers centres » aux listes simplement « soutenues » par certains partis – dont LREM – ou par la « majorité présidentielle », instaurant dès lors une différence de traitement caractérisée. De façon prévisible, le moyen tiré de l’atteinte par ces dispositions au principe d’égalité est considéré par le juge des référés comme propre à créer un doute sérieux quant à la légalité de la circulaire en cause. – Enfin, en troisième et dernier lieu, le texte contesté classait la nuance « Liste Debout la France » dans le bloc de clivage « extrême-droite ». Or, cette classification déjà opérée pour les élections législatives de 2017 se fondait principalement sur des déclarations du Président du parti durant les élections présidentielles de 2017 en…