Elevages: le délai de recours réduit à 4 mois va t-il survivre aux discussions parlementaires relatives au projet de loi Macron?

Les délais de recours contre les autorisations ICPE ont régulièrement fait l’objet de tentatives d’allégement, parfois réussies, dans un double souci de préserver bien entendu le droit au recours tout en réduisant l’insécurité juridique de l’exploitant de l’installation. Les discussions parlementaires en cours au sujet de la Loi “CROISSANCE, ACTIVITÉ ET ÉGALITÉ DES CHANCES ÉCONOMIQUES” (dite Loi Macron) vont peut être modifier l’état du droit dans le sens d’un raccourcissement des délais. Rappelons que l’état actuel du droit témoigne déjà l’existence de délais “spéciaux”. La règle pour les tiers demeure aujourd’hui celle d’un délai de droit commun d’une année à compter de la publication ou de l’affichage de la décision (avec un tempérament si la mise en service de l’installation n’est pas intervenue six mois après la publication ou l’affichage de ces décisions, le délai de recours continuant alors à courir jusqu’à l’expiration d’une période de six mois après cette mise en service). Ce délai a très longtemps été de 4 ans, sans prorogation. Plusieurs exceptions ont existé et existent encore : pour les élevages : le délai de recours des tiers était raccourci déjà à une année, pour s’aligner aujourd’hui sur le délai de droit commun, avec une prorogation de 6 mois le cas échéant (article L515-27 du code de l’environnement); pour les éoliennes: le délai de recours des tiers est de six mois à compter de la publication ou de l’affichage des décisions, sans prorogation (article L 553-4 du code de l’environnement).   A l’occasion de la Loi Macron actuellement en débat au Parlement, un amendement n°SPE534 relatif à l’article 26bis du projet de loi a été adopté en Commission. Il vise à porter le délai de recours contre les décisions administratives relatives aux élevages d’une année à 4 mois (le Sénat l’ayant auparavant réduit à 2 mois). L’exposé de l’amendement indique: “La réduction du délai de recours contre les arrêtés d’autorisation d’exploitation d’installations d’élevage classées pour la protection de l’environnement, aujourd’hui fixé à un an, est nécessaire. La durée de deux mois semble toutefois trop courte et il est donc proposé de fixer une durée de quatre mois, conformément aux recommandations des groupes de travail sur la simplification du droit de l’environnement, auxquels ont participé les représentants du monde agricole. Cela laissera le temps aux recours de s’exprimer, sans pour autant exposer les exploitants à une trop forte insécurité juridique, puisque le délai de recours actuel est divisé par trois“. On remarquera également qu’à ce stade, le délai de recours raccourci de deux mois pour toutes les installations classées (en supprimant au passage le délai spécial pour les éoliennes) n’a pas passé le filtre de la Commission Mixte Paritaire. Il peut paraître regrettable que les délais soient sujets à de telles variables d’ajustement, moins guidées par des logiques juridiques que par des pressions politiques. Ces dernières peuvent se comprendre, surtout dans un contexte dans lequel les élevages ont besoin de visibilité, de davantage de latitude et d’allégement, si possible selon les circonstances locales, des prescriptions. Mais en ce cas, la cohérence voudrait un raccourcissement général des recours pour l’ensemble des installations classées, élevages et éoliennes comprises car l’ancienne justification des délais “longs” (laisser le temps au voisinage d’apprécier les inconvénients de l’installation) ne peut guère, à notre sens, apparaître comme fondée. Affaire à suivre…

Cogénération: la CRE souligne les obstacles juridiques au projet d’arrêté modifiant les conditions d’achat de l’électricité

La Commission de régulation de l’énergie a mis en ligne sa délibération sur le projet d’arrêté ministériel modifiant les conditions d’achat de l’électricité produite par les installations de cogénération. On peut s’empêcher de constater, avez regret, que la principale observation sur l’application de cet arrêté aux installations existantes découle de la qualification législative que le législateur a cru bon de donner aux contrats d’achat d’électricité (Loi Grenelle II, 12 juillet 2010, codifié in L 314-7 du code de l’énergie). Ainsi, le projet d’arrêté prévoirait: – à l’article 6 ali.1er: l’application par avenant des nouvelles conditions tarifaires aux installations de cogénération dont le récépissé de dépôt de demande complète de contrat d’achat a été délivré avant la date de publication dudit arrêté; – à l’article 6 ali.2 : la conclusion de « nouveaux contrats » pour (i) les installations respectant les conditions des décrets du 6 décembre 2000 et du 10 mai 2001 à la date du récépissé de dépôt de demande complète de contrat d’achat par le producteur et (ii) les installations de cogénération à haut rendement soit celles dont l’économie d’énergie primaire est supérieure ou égale à 10%.   Premièrement, les installations ayant fait l’objet d’un récépissé de demande complète de contrat d’achat ne pourront juridiquement pas, d’après la CRE, bénéficier d’un avenant En effet, le premier alinéa de l’article 6 du projet d’arrêté prévoit l’application par avenant des nouvelles conditions tarifaires aux installations de cogénération dont le récépissé de dépôt de demande complète de contrat d’achat a été délivré avant la date de publication dudit arrêté. Or, rappelle la CRE, “il n’est juridiquement pas possible de conclure un avenant dans le cas où seule une demande de contrat d’achat aurait été déposée au moment de l’entrée en vigueur de l’arrêté” puisque pour qu’un avenant soit conclu, encore faut il qu’un “contrat” soit conclu. Or, l’article L 314-7 du code de l’énergie (après l’intervention de la loi grenelle II) prévoit que le contrat d’achat n’est conclu “qu’à la date de signature du contrat“. Ainsi, un avenant modifiant les conditions tarifaires pour les installations de cogénération ayant seulement fait l’objet d’un récépissé de dépôt de demande de contrat d’achat n’est juridiquement pas envisageable. Deuxièmement, pour les contrats d’achat déjà conclus, la CRE rappelle que seule une modification  du contrat liée à la variation des prix des combustibles est prévue La Commission rappelle encore, s’agissant des contrats d’achat déjà conclus, qu’”un acte réglementaire ne peut pas modifier des contrats en sauf (i) si ces contrats le prévoient expressément ou (ii) si des dispositions législatives le prévoient expressément, pour un motif d’intérêt général“. En l’espèce, elle relève que les modèles de contrats d’achat du 31 juillet 2001 (cogénération et cogénération rénovée), tels qu’approuvés par le ministre, ne prévoient aucune possibilité de modification, à l’exception des clauses d’indexation. Les installations de cogénération ont ceci de particulier que le code de l’énergie prévoit un type de modification du contrat, ce qui conduit la CRE à conclure que “seule une modification contractuelle liée à la variation des prix des combustibles peut être appliquée aux contrats d’achat en vigueur“. Troisièmement, s’agissant de la conclusion de nouveaux contrats, la CRE souligne la contradiction avec l’article L314-2 du code de l’énergie La délibération est particulièrement claire: le second alinéa de l’article 6 du projet d’arrêté, qui prévoit la conclusion de “nouveaux contrats”, trouve à s’appliquer à des installations qui ont déjà été mises en service, dont l’efficacité énergétique est supérieure à 10%, et qui bénéficient déjà d’un contrat d’achat en cours, est incompatible avec l’article L. 314-2 du code de l’énergie, lequel dispose que ces installations ne peuvent bénéficier qu’une seule fois d’un contrat d’obligation d’achat. La CRE recommande donc de supprimer le not « nouveau » de la première phrase du deuxième alinéa de l’article 6 du projet d’arrêté.     Quatrièmement et enfin, une incohérence avec l’arrêté de 2001 devra être levée Pour les installations non encore mises en service à la date de publication de l’arrêté, ou déjà mises en service mais ne bénéficiant pas d’un contrat d’achat, le projet d’arrêté modifie le taux d’économie d’énergie primaire que doit atteindre une installation de cogénération pour bénéficier de l’obligation d’achat. La CRE rappelle que seules les installations de cogénération à haut rendement entrent dans le champ d’application dudit projet d’arrêté, conformément aux dispositions de la directive 2012/27/UE du 25 octobre 2012 relative à l’efficacité énergétique (laquelle doit être transposée au plus tard le 5 juin 2014). Cependant, la délibération souligne que “ces dispositions sont en contradiction avec celles de l’article 2 de l’arrêté du 3 juillet 2001 fixant les caractéristiques techniques des installations de cogénération pouvant bénéficier de l’obligation d’achat d’électricité, portant à 5 % la valeur minimale de l’économie relative d’énergie primaire pour considérer l’installation comme utilisant des techniques de cogénération et par conséquent bénéficier de l’obligation d’achat. Ainsi, si le ministre souhaite porter à 10 % l’économie d’énergie primaire des installations de cogénération bénéficiant de l’obligation d’achat, il convient de modifier également les dispositions de l’article 2 de l’arrêté du 3 juillet 2001 précité.”     Bien que la délibération de la CRE ait  une valeur consultative, il est probable, à tout le moins recommandé, que l’arrêté définitif tienne compte de ces observations juridiques fondamentales.  

Actualité: GREENLAW publie une synthèse en droit des énergies renouvelables dans la Revue “Droit de l’environnement”

[dropcap]R[/dropcap]enouvelant la synthèse opérée en l’année 2010/2011, le cabinet a publié dans la Revue “Droit de l’environnement” de mars 2012 la synthèse en droit des énergies renouvelables 2011/2012, abordant les principales évolutions législatives et réglementaires touchant les ENR, et analysant la jurisprudence intervenue depuis une année.    

BIOGAZ: les prescriptions applicables aux installations enregistrées pour la combustion (rubrique 2910C ICPE)

Les professionnels de la méthanisation prendront connaissance des deux textes parus ce week end et qui intéressent leur installatyions:   l’arrêté du 08 décembe 2011 paru au Journal Officiel le 22 janvier 2012, qui fixe les prescriptions ministérielles applicables aux installations relevant du régime de l’enregistrement au titre de la rubrique n° 2910-C de la nomenclature des ICPE.   le décret n° 2012-62 du 20 janvier 2012 relatif aux garanties d’origine de l’électricité produite à partir de sources renouvelables ou par cogénération   Ce décret, pris en application de l’ordonnance n° 2011-1105 du 14 septembre 2011, fixe les conditions de désignation de l’organisme qui est chargé de délivrer les garanties d’origine et peut, le cas échéant, procéder à leur transfert ou leur annulation. Il définit les moyens et obligations de l’organisme et fixe le régime des garanties d’origine ainsi que les modalités de tenue du registre et les tarifs d’accès à ce service.     L’arrêté s’applique quant à lui aux installations relevant de la rubrique 2910C de la nomenclature. Cette rubrique concerne les installations de combustion consommant exclusivement du biogaz produit par une seule installation de méthanisation soumise à enregistrement sous la rubrique n° 2781-1. Ces prescriptions sont applicables dès aujourd’hui à toute nouvelle installation non autorisée: Article 1er: “Le présent arrêté fixe les prescriptions applicables aux installations classées soumises à enregistrement sous la rubrique n° 2910-C. Il ne s’applique pas aux installations existantes déjà autorisées au titre de la rubrique n° 2910. Les dispositions s’appliquent aux installations sans préjudice de prescriptions particulières les complétant ou les renforçant dont peut être assorti l’arrêté d’enregistrement dans les conditions fixées par les articles L. 512-7-3 et L. 512-7-5 du code de l’environnement”.   Ces textes participent de la mise en place progressive du cadre réglementaire applicable en matière d’ICPE aux installations de méthanisation utilisant notamment la cogénération, en sus des textes relatifs à la vente d’électricité.