Espèces protégées : absence de raison impérative d’intérêt public majeur pour une retenue d’eau

Espèces protégées : absence de raison impérative d’intérêt public majeur pour une retenue d’eau

Par Maître David DEHARBE, avocat gérant et Frank ZERDOUMI, juriste (Green Law Avocats)

Le 19 septembre 2022, le Préfet de la Haute-Savoie a pris un arrêté déclarant d’utilité publique les acquisitions de terrain et les travaux nécessaires à la réalisation d’un projet d’aménagement de la retenue d’altitude de la Colombière sur la commune de La Clusaz.

Le 20 septembre 2022, le Préfet de la Haute-Savoie a pris un autre arrêté délivrant à la commune de La Clusaz une autorisation environnementale valant autorisation de défrichement, autorisation au titre de la loi sur l’eau et dérogation aux interdictions d’atteinte aux espèces protégées, relative à l’aménagement de la retenue de la Colombière, au prélèvement d’eau de la Gonière et au renforcement du réseau neige sur la commune de La Clusaz.

Le 29 septembre 2022, les associations France Nature Environnement Auvergne Rhône-Alpes, France Nature Environnement Haute-Savoie, Nouvelle Montagne, Mountain Wilderness France et la Ligue de protection des oiseaux ont saisi le Tribunal administratif de Grenoble, afin d’obtenir l’annulation de cet arrêté du 20 septembre 2022.

Le même jour, elles ont déposé un référé suspension auprès du même Tribunal afin que le juge des référés suspende l’exécution de l’arrêté.

Le 25 octobre 2022, le juge des référés du Tribunal administratif de Grenoble a suspendu l’arrêté.

Le 19 janvier 2023, la Fédération de Haute-Savoie pour la pêche et la protection du milieu aquatique et l’Association Les Pêcheurs en rivière du secteur d’Annecy ont déposé, à leur tour, une requête auprès du Tribunal administratif afin d’obtenir l’annulation de cet arrêté.

La retenue d’eau de La Clusaz est-elle légale ?

Le Tribunal administratif de Grenoble a répondu à cette question par la négative, en annulant l’arrêté du Préfet de la Haute-Savoie (décision commentée : TA Grenoble, 23 juillet 2025, n° 2206292 ).

Autorisation environnementale : avis défavorable sur le projet de décret accélérant les procédures contentieuses

Autorisation environnementale : avis défavorable sur le projet de décret accélérant les procédures contentieuses

Par Frank ZERDOUMI et Mathieu DEHARBE, juristes (Green Law Avocats)

A l’occasion des discussions autour des freins à la réindustrialisation de la France en commission d’enquête, la Direction générale des Entreprises (DGE) a insisté sur la nécessité d’alléger le poids des procédures contentieuses.

En réponse, la DGE a préparé un projet de décret en Conseil d’État relatif à l’accélération des procédures contentieuses pour faire face à la multiplication des recours contentieux en matière d’autorisation environnementale.

En parallèle, la DGE a saisi pour avis le Conseil supérieur des tribunaux administratifs et des cours administratives d’appel (CSTACAA) conformément aux dispositions de l’article L. 232-3 du code de justice administrative.

Saisi de ce projet de texte, le CSTACAA a mis un avis défavorable au vu de ses dispositions procédurales dérogatoires aux règles de droit commun (avis du 2 juillet 2025 ).

Contentieux des ICPE : procédure de régularisation et délai de jugement

Contentieux des ICPE : procédure de régularisation et délai de jugement

Par Mathieu DEHARBE et Frank ZERDOUMI, juristes (Green Law Avocats)

Afin de simplifier le droit de l’environnement, un régime d’autorisation simplifiée, la procédure d’enregistrement, a été institué en matière d’installations classées pour la protection de l’environnement par l’ordonnance n° 2009-663 du 11 juin 2009.

Contrairement au régime de l’autorisation environnementale, le législateur n’avait pas envisagé expressément la possibilité ou non de régulariser des arrêtés d’enregistrement entachés d’illégalités.

Face au silence des textes, le Conseil d’État a d’une part reconnu que ces dispositions s’appliquent aux recours formés contre une décision d’enregistrement d’une installation classée dans le cas où le projet fait l’objet, d’une autorisation environnementale tenant lieu d’enregistrement ou s’il est soumis à évaluation environnementale donnant lieu à une autorisation du préfet (CE, Avis n° 474431, 10 novembre 2023, point 5 ).

D’autre part, la Haute juridiction considère que dans les autres cas le juge de plein contentieux des installations classées dispose d’un pouvoir de régularisation d’un vice entachant l’élaboration ou la modification de l’enregistrement (CE, Avis n° 474431, 10 novembre 2023, point 6 ).

Malgré ces clarifications, une question demeurait : celle du bénéfice d’un délai supplémentaire pour les juge du fonds de statuer sur la suite à donner au litige en cas d’enregistrement du mémoire transmettant la régularisation.

A ce titre, cette problématique a été traitée récemment dans une décision de la Cour administrative d’appel de Douai (décision commentée : CAA Douai, 6 février 2025, n° 24DA00735,).

Préjudice écologique : l’exigence d’une faute durable pour sa réparation

Préjudice écologique : l’exigence d’une faute durable pour sa réparation

Par Maître David DEHARBE, Avocat Gérant et Frank ZERDOUMI, juriste (Green Law Avocats) 

Le 29 juin 2018, la Préfète de Lot-et-Garonne a pris un arrêté autorisant le syndicat à créer et à exploiter une retenue d’eau collective à usage d’irrigation et de soutien d’étiage sur le lac de Caussade, à Pinel-Hauterive.

Le 15 octobre 2018, la Préfète a pris un autre arrêté retirant cette autorisation.

Mais le syndicat a poursuivi les travaux, malgré l’absence d’autorisation préfectorale.

De plus, il a exploité la retenue illégalement mise en eau. L’Association France Nature Environnement et deux autres associations de protection de la nature et de l’environnement ont donc demandé l’indemnisation des préjudices qu’elles estimaient avoir subi à raison de fautes imputées à l’État.

La responsabilité de l’État pouvait-elle être engagée en raison du caractère irrégulier de la construction d’une retenue d’eau réalisée par le syndicat départemental des collectivités irrigantes de Lot-et-Garonne ?

Le Tribunal administratif de Bordeaux a répondu à cette question par l’affirmative, sans pour autant condamner l’État distinguant l’illégalité de l’autorisation de l’édiction de sanctions administratives et enfin leur mise en œuvre matérielle par l’administration (décision commentée : TA Bordeaux, 6 février 2025, n° 2300568).

Pas de nécessité impérieuse à réaliser l’A69 : point d’étape

Pas de nécessité impérieuse à réaliser l’A69 : point d’étape

Par David DEHARBE, avocat gérant et Frank ZERDOUMI, juriste

Le 1er mars 2023, au titre de l’article L. 181-1 du Code de l’environnement, les Préfets de la Haute-Garonne et du Tarn ont pris un arrêté valant autorisation en vue de la réalisation des travaux de liaison autoroutière entre Verfeil et Castres, dite A69.

Le 21 juin 2023, des associations environnementales ont saisi le Tribunal administratif de Toulouse afin qu’il annule ce projet d’autoroute A69.

D’après ces associations, au vu des bénéfices très limités de ce projet pour le territoire et pour ses habitants, il n’était pas possible de déroger aux règles de protection de l’environnement et des espèces protégées.

Cet arrêté préfectoral interdépartemental était-il légal ?

Le Tribunal a répondu à cette question par la négative, annulant ainsi l’autorisation (décision commentée : TA de Toulouse, 27 février 2025, n° 2303544).