« Tiers demandeur » à la remise en état : mise en consultation des projets de textes réglementaires supprimant l’exigibilité d’une garantie à première demande

aerial view of petrol industrial zone

Par Yann BORREL- Green Law Avocats

L’article 173 de la loi n° 2014-366 du 24 mars 2014 pour l’accès au logement et un urbanisme rénové, dite loi « ALUR », a institué un dispositif spécifique dit du « tiers demandeur » portant sur la prise en charge volontaire, par un tiers, de la remise en état d’un site pollué par une installation classée (I.C.P.E.) lors de la cessation d’activité ou postérieurement à cette dernière. L’objectif du dispositif est de favoriser et de sécuriser la reconversion d’anciens sites industriels par des aménageurs ou par des promoteurs.

Le cadre juridique de ce dispositif a été codifié à l’article L. 512-21 du code de l’environnement et aux articles R. 512-76 à R. 512-81 du même code. Un arrêté relatif à l’attestation de garanties financières le complète (cf. arrêté du 18 août 2015, JORF n°0199 du 29 août 2015).

Ce dispositif constitue une évolution remarquable du droit des I.C.P.E car sa mise en œuvre aboutit à ce que l’autorité préfectorale prescrive les mesures de réhabilitation d’une installation classée à un opérateur qui n’a jamais été exploitant, le cas échéant en substitution de l’exploitant connu et avec l’accord de ce dernier. Or jusqu’à présent, les juridictions ont refusé d’admettre que la responsabilité de la remise en état puisse être transférée par l’exploitant d’une I.C.P.E à un tiers (V. à titre d’exemple : 3ème Civ., 16 mars 2005, pourvoi n° 03-17875, Bull. 2005 III, n° 67, p. 60 ; CE 29 mars 2010, n° 318886, Communauté de communes de Fécamp, JurisData n° 2010-002970).

Au-delà de son caractère novateur, le dispositif est demeuré jusqu’ici peu attractif pour les aménageurs et pour les promoteurs. En effet, outre qu’il demeure porteur d’incertitudes en ce qui concerne les risques juridiques supportés par le tiers qui prend en charge la remise en état d’un site pollué par une I.C.P.E (cf. D. Deharbe et Y. Borrel, Jcl. Fasc.  4020 : INSTALLATIONS CLASSÉES POUR LA PROTECTION DE L’ENVIRONNEMENT. – Obligation administrative de remise en état, éd. LexisNexis Jurisclasseur), le tiers demandeur qui souhaite se substituer à l’exploitant pour la réhabilitation d’un terrain ayant accueilli une I.C.P.E doit constituer des garanties financières à première demande.

Cette obligation a constitué un frein à la mise en œuvre du dispositif, qui constitue une démarche volontaire. En particulier, elle a exclu la possibilité de constituer des actes de cautionnement et a rendu le coût des garanties financières plus élevées (cf. Rapport n° 3442 fait au nom de la Commission du développement durable et de l’Aménagement du territoire, enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 9 mars 2016).

Dans ce contexte, un amendement adopté dans la loi n° 2016-1087 du 8 août 2016 pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages a substitué à l’obligation de constituer des garanties financières à première demande pour les aménageurs empruntant ce dispositif une obligation de garanties financières simples (cf. amendement n° 605 rect. présenté par le Gouvernement adopté en séance publique au Sénat le 22 janvier 2016).

Afin de tirer les conséquences de cette évolution législative, le Ministère de l’Environnement a récemment soumis à la consultation du public un projet de décret et un projet d’arrêté ministériel. Le projet de décret modifie notamment l’article R. 512-80 du code de l’environnement afin de supprimer la référence aux mots « de garanties à première demande » [cliquer sur ce lien]. Par ailleurs, le projet d’arrêté, qui modifie l’arrêté ministériel en date du 18 août 2015 précité, définit le modèle d’acte de cautionnement solidaire pour les garanties financières prévues à cet article [cliquer sur ce lien].

La présentation de ces projets par le Ministère de l’Environnement est en ligne sur le site internet http://www.consultations-publiques.developpement-durable.gouv.fr/. Le public est invité à présenter ses observations sur ces projets jusqu’au 23 décembre 2016.

Ces projets ont été examinés lors de la séance du C.S.P.R.T. du 13 décembre 2016.