Nous l’avions appris ce week end, la Cour d’appel de Versailles a confirmé, dans un arrêt bien motivé, la compétence du juge judiciaire pour trancher les litiges relatifs à l’indemnisation du préjudice causé par l’absence de transmission, ou le retard de transmission de la PTF aux producteurs d’électricité (téléchargeable ci-après: CA versailles_erdf_violay 4.10.2012).

Ainsi, l’arrêt de la Cour d’appel de Versailles a, au terme d’un arrêt rejetant successivement les arguments soulevés par le gestionnaire de réseau en faveur de la compétence de la juridiction administrative, considéré que « Le jugement du tribunal de commerce de Nanterre qui a retenu sa compétence doit donc être entièrement confirmé. »

 

Arrêt important, ce n’était toutefois pas le plus attendu par certains producteurs. Une autre décision rendue le 26 octobre 2012 par la Cour d’appel de Paris vient en effet de confirmer que les recours indemnitaires devaient être tranchés par le juge judiciaire (téléchargeable ci-après, avec l’aimable autorisation de mon confrère Me Guiheux: CA Paris 26.10.2012 VolVsolar).

Bien que cet arrêt fera très probablement l’objet d’un recours en cassation, il est intéressant de noter le raisonnement du juge, qui devrait en toute logique être suivi par les juges de première instances, Tribunaux de renvoi en tête:

  • la Cour d’appel de Paris considère ainsi premièrement, après avoir écarté la demande en nullité du jugement, que « si l’envoi des propositions techniques et financières précède nécessairement la conclusion du contrat d’achat d’électricité par EDF, lequel est qualifié de contrat administratif par la loi n°2010-788 du 12 juillet 2010, cette circonstance ne suffit pas à elle seule à conférer aux actes qui précèdent ce contrat le caractère d’acte administratif et, partant, à soumettre au juge administratif un litige né d’un éventuel manquement de ERDF à la procédure de traitement des demandes de raccordement, la délivrance des propositions techniques et financières conservant, à l’égard du contrat d’achat d’électricité conclu entre le producteur et EDF et dont l’objet diffère, un caractère autonome; »

 

  • Deuxièmement, en réponse à l’argument tiré de ce qu’ERDF « exécute une mission de service public pour le compte des collectivités concédantes, qu’en contrôlant les conditions techniques de raccordement des producteurs au réseau de distribution elle agit au nom et pour le compte des communes lui ayant délégué le service public de la distribution d’électricité et qu’elle conclut des conventions administratives de raccordement qui déterminent le mode de financement et la construction d’ouvrages publics ; », la Cour d’appel répond que  « l’exécution d’une mission de service public par une société commerciale n’a pas pour conséquence de conférer à chacun de ses actes le caractère d’un acte administratif ; que, contrairement à ce qu’affirme ERDF, la demande en réparation formée par Vol-V Solar n’est pas une demande portant sur sa participation financière à la construction d’ouvrages publics, laquelle relèverait en effet de la compétence de la juridiction administrative ; »

 

  • Enfin, la Cour d’appel de Paris écarte le fait que la convention de raccordement puisse revêtir un caractère obligatoire « qui, selon ERDF, ferait peser une présomption d’administrativité supplémentaire sur cette convention », car cela ne suffit pas, selon l’arrêt à « conférer à la décision de délivrance des propositions techniques et financières, objet du présent litige, le caractère de décision administrative pas plus que la procédure à laquelle est soumis le traitement des demandes de raccordement et qui a été établie en application de la délibération de la Commission de régulation de l’énergie du 11 juin 2009 « ;

 

Ces deux décisions sont extrêmement importantes dans le cadre des nombreux litiges encore pendants devant les juridictions civiles et commerciales. Certes, ce ne sont pas les premières décisions en faveur de la compétence du juge judiciaire, mais la confirmation successive, par deux juridictions d’appel telles que Versailles et Paris, laisse légitimement espérer qu’enfin, la question de fond (l’indemnisation du préjudice) va pouvoir être abordée. La prochaine étape consistera en effet en la confirmation par les juges de première instance de leur compétence , puis le jugement au fond des litiges.

 

Stéphanie Gandet

Green Law Avocat

Avocat associé