Raccordement : avis de la CRE sur le projet de décret relatif à l’approbation d’ouvrage électrique (APO), en application de la loi ESSOC

Digging of a big electricity cable trench for a big new windfarm in the Netherlands

Par Stéphanie GANDET- Avocat associé, spécialisée en droit de l’environnement

L’article 59 de la loi n° 2018-727 du 10 août 2018 pour un État au service d’une société de confiance a modifié l’article L. 323-11 du code de l’énergie, qui prévoit une approbation du projet d’ouvrage (APO) pour les nouveaux ouvrages électriques.

Précisément, l’article 59 de la loi limite désormais l’approbation aux seules lignes électriques aériennes. Les lignes électriques souterraines et les postes électriques n’y sont plus soumis, pas plus que les ouvrages assimilés (comme le furent considérés les raccordements internes aux ouvrages de production, parcs éoliens, centrales solaires le cas échéant etc…).

Cela doit être salué.

Toutefois, en contrepartie de cette simplification, l’article L. 323-11 du code de l’énergie prévoit dorénavant la mise en place d’un contrôle externe réalisé par un organisme indépendant destiné à vérifier la conformité électrique de ces ouvrages ne faisant plus l’objet d’une APO, afin d’assurer la sécurité des tiers.

Ce contrôle est limité aux seuls ouvrages électriques qui cheminent sur le domaine public ou sur des terrains appartenant à des tiers.

Le projet de décret a été soumis pour avis à la Commission de régulation de l’énergie (CRE) qui a été saisie, le 12 septembre 2018, par le ministre d’État, ministre de la transition écologique et solidaire.

Pour rappel, il convient de relever parmi les disposition les plus importantes du projet de décret:

  • L’article 1er du projet de décret prévoit la suppression au premier alinéa de l’article R. 323-25 du code de l’énergie des mots « , à l’exception des postes de transformation du courant de haute [ou] très haute tension en moyen tension ». Comme le souligne la CRE, les postes électriques qui transforment l’électricité de la haute tension du domaine A en haute tension du domaine B et qui sont localisés à l’interface entre les réseaux publics de distribution et le réseau public de transport (appelés « postes sources ») feront donc désormais l’objet d’une consultation par le maitre d’ouvrage, dans la mesure où ils seront dispensés d’APO.
  • L’article 2 du projet de décret met en cohérence l’article R. 323-26 du code de l’énergie avec le nouvel article L. 323-11, en remplaçant au premier alinéa les mots « création d’un poste en haute ou très haute tension, tout projet de travaux entraînant l’extension de la surface foncière d’un tel poste ainsi que tout projet d’ouvrage de plus de 50 kilovolts d’un réseau public d’électricité » par les mots « ligne électrique aérienne d’un réseau public d’électricité dont la tension est supérieure à 50 kilovolts ». Ainsi, cet article supprime notamment l’APO exigée pour les postes en haute et très haute tension, et la maintient seulement pour les lignes électriques aériennes d’un réseau public d’électricité dont la tension est supérieure à 50 kilovolts.
  • L’article 4 du projet de décret qui modifie la sous-section du code de l’énergie relative aux « Ouvrages assimilables aux réseaux publics d’électricité ». Il supprime, également, l’APO pour les ouvrages de tiers (producteurs et consommateurs), à l’exception des lignes électriques aériennes qui sont soumises à la procédure d’APO prévue aux articles R. 323-26 et R. 323-27 du code de l’énergie, ainsi qu’au contrôle technique, dans les conditions prévues aux articles R. 323-30 à R. 323-32 du code de l’énergie.

Par une délibération du 11 octobre 2018, la CRE se prononce sur ce projet de décret d’application de l’article 59 de la loi n° 2018-727 du 10 août 2018 pour un État au service d’une société de confiance.

La CRE émet un avis favorable au projet de décret qui lui a été soumis, sous réserve de la prise en compte de sa demande de modification du troisième aliéna de son article 4 : rajouter que les ouvrages font l’objet d’un « contrôle de conformité sur pièces et sur place, pendant ou après la réalisation des travaux ».

En effet, s’agissant du contrôle des ouvrages assimilés (type: raccordement interne de parc), la CRE estime insuffisant m’article 4 du projet de décret qui propose que les ouvrages situés en amont du point d’injection par les producteurs sur le réseau public d’électricité et ceux qui sont situés en aval du point de raccordement des consommateurs au réseau public, autres que les lignes électriques aériennes et les lignes sous-marines, fassent l’objet d’un « contrôle de conformité sur pièces et sur place », par un organisme agréé, tenu à la disposition des autorités compétentes.

Elle motive sa réserve en indiquant « Cependant, la mise en œuvre des lignes électriques souterraines (câbles souterrains) est parfois réalisée par l’utilisation de matériels (sous-soleuse par exemple) ne permettant pas une visualisation du câble en fond de tranchée, car celui-ci est immédiatement recouvert durant son enfouissement.

De plus, certains ouvrages doivent être installés sur un temps très court, notamment pour des raisons de contraintes pratiques liées à un chantier, que ce soit vis-à-vis de la sécurité des biens et des personnes ou selon l’imposition du propriétaire des emprises foncières publiques ou privées sur lesquelles les ouvrages sont installés.

Par ailleurs, il convient de s’assurer que les nouvelles modalités de contrôle, mises en place dans un objectif de simplification, n’engendrent pas de difficultés ou risques complémentaires en imposant, par exemple, de laisser une tranchée ouverte le temps de son contrôle. »

En conséquence, la CRE propose de modifier le troisième alinéa de l’article 4 du projet de décret et de rajouter que les ouvrages font l’objet d’un « contrôle de conformité sur pièces et sur place, pendant ou après la réalisation des travaux » (nous soulignons)

Une vigilance toute particulière doit donc être adoptée par les maîtres d’ouvrage afin d’appliquer le décret, éventuellement modifié en tenant compte des modalités de contrôle du raccordement électrique.