bouton poid lourd flêche verteLa loi assurant la mise en œuvre de l’écotaxe poids lourds, l’une des mesures du Grenelle de l’environnement, vient d’être approuvée par le Conseil Constitutionnel. En effet, certains députés avaient saisi la Haute Juridiction avant la promulgation du texte, au motif que son article 16 § I était contraire aux principes d’égalité devant l’impôt et d’unité et de spécialité du budget de l’Etat, ainsi qu’à la liberté d’entreprendre.

Dans sa décision 2013-670 DC du 23 mai 2013, le Conseil Constitutionnel rejette ces différentes critiques.

L’article 16 de la loi contestée modifie l’article L. 3222-3 du code des transports, qui prévoit désormais une majoration de plein droit du prix de la prestation de transport routier de marchandises fixé entre le transporteur et le chargeur (son commanditaire) sur la base d’un taux régional. Cette majoration vise à répercuter l’écotaxe instaurée par les articles 269 à 283 quater du code des douanes sur le prix de la prestation : la loi transfère donc la charge de cette taxe du transporteur à son client.

La majoration s’applique à la partie du transport assurée sur le territoire métropolitain quel que soit l’itinéraire emprunté par le transporteur : elle est calculée par l’application au prix des transports d’un taux déterminé en fonction des régions de chargement et de déchargement des marchandises transportées et, pour les transports internationaux, de celles où se situent les points d’entrée et de sortie du territoire métropolitain. Par ailleurs, un taux unique, défini par région, s’applique pour les transports intra-régionaux, tandis qu’un taux unique national s’applique pour les transports interrégionaux.

On notera que  les véhicules assurant la collecte de lait, les véhicules propriété de l’Etat ou d’une collectivité locale affectés à l’entretien et à l’exploitation des routes sont exonérés de cette taxe.

  • En premier lieu, le Conseil Constitutionnel rappelle que la majoration forfaitaire est intégralement perçue par l’entreprise de transport, et en déduit « qu’elle ne constitue ni un impôt de l’Etat ni une recette publique ». Ainsi, les Sages du Palais Royal refusent de considérer le dispositif de répercussion de la taxe comme une mesure fiscale : le transporteur fait écran entre le chargeur, qui pourtant en acquitte indirectement au moins une partie, et l’Etat, qui en est le bénéficiaire. Ils rejettent donc les moyens relatifs à la violation des principes d’égalité devant l’impôt, et d’unité et de spécialité budgétaire, qu’ils jugent inopérants.

  • En deuxième lieu, les députés soutenaient que le principe d’égalité avait été méconnu en ce que la majoration, en ce qu’elle est applicable aux seuls transports pour le compte d’autrui, créait une différence de traitement non justifiée entre, d’une part, les transporteurs en compte propre et les transporteurs pour le compte d’autrui, et, d’autre part entre les chargeurs en compte propre et les chargeurs pour le compte d’autrui.

Estimant que la différence de traitement se fonde sur un critère objectif (la différence de situation entre les différentes catégories de chargeurs et de transporteurs) et qu’elle est en rapport direct avec l’objectif de la loi (qui est d’assurer la participation effective des bénéficiaires de la prestation à l’augmentation de prix résultant de la taxe), le Conseil Constitutionnel écarte également ce moyen.

  • Enfin, la Haute Juridiction n’a pas retenu la méconnaissance de la liberté d’entreprendre, dont il rappelle qu’elle peut être limitée par le législateur à condition de ne pas porter une atteinte disproportionnée au regard de l’objectif de politique économique poursuivi. En l’espèce, il y a bien une limitation de la liberté de fixation des prix, mais elle reste proportionnée.

Validée par cette décision, la loi a donc été promulguée le 28 mai 2013 : la mesure relative à l’écotaxe poids lourds entrera en vigueur au 1er octobre 2013. Son taux est compris entre 0,025 € et 0,20 € par kilomètre, en fonction du nombre d’essieux, du poids total autorisé en charge (PTAC) et de la classe d’émission EURO du véhicule, avec un abattement de 30 % pour les régions excentrées, comme la Bretagne.

Lou DELDIQUE  élève avocate (Green Law Avocat)