
Par Maître Yann BORREL, avocat associé (Green Law Avocats)
Dans une ordonnance n° 2308616 du 19 mai 2023, le Tribunal administratif de Paris a rejeté la demande présentée par la Fédération professionnelle des entreprises de recyclage (FEDEREC) aux fins d’obtenir la suspension de l’agrément de la société Valdelia en tant qu’éco-organisme de la filière à responsabilité élargie du producteur de produits et matériaux de construction du secteur du bâtiment (téléchargeable ci-dessous et disponible sur Doctrine et Actu Environnement).
Dans la présente affaire, par un arrêté du 6 octobre 2022, le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires et le ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique ont prononcé l’agrément, sur le fondement de l’article L. 541-10 du code de l’environnement, de la société Valdélia en tant qu’éco-organisme jusqu’au 31 décembre 2027, pour répondre aux exigences fixées par le cahier des charges annexé du 10 juin 2022 susvisé pour les produits et matériaux de construction du secteur du bâtiment relevant des catégories mentionnées au 2o du II de l’article R. 543-289.
La FEDEREC fait valoir, pour justifier l’existence d’une situation d’urgence :
- D'une part, que la décision attaquée, qui a pris effet le 1er mai 2023, aurait porté gravement atteinte aux intérêts des gestionnaires de déchets et à l’intérêt public ;
- D'autre part, que l’agrément contesté a eu pour effet d’affecter substantiellement et durablement la compétitivité des entreprises de gestion des déchets et la structure du marché sur lequel elles opèrent, les privant, compte tenu des modalités obligatoires de participation avec l’entreprise agrée à la collecte des déchets, de leur clientèle « historique » ;
- Par ailleurs, qu’il a porté atteinte à la concurrence en accordant à l’entreprise agréée et aux entreprises de son réseau un avantage indu ;
- Enfin que cet agrément est incompatible avec la mise en œuvre efficace de la responsabilité élargie du producteur dans un objectif de protection de l’environnement.
Le juge des référés a relevé que l’agrément contesté a été précédé d’agréments accordés à trois autres entreprises en tant qu’éco-organisme de la filière à responsabilité élargie du producteur de produits et matériaux de construction du secteur du bâtiment, après l’avis du 22 septembre 2022 de la commission inter filières de responsabilité élargie des producteurs.
Le tribunal administratif a noté que la gestion des déchets du bâtiment serait assurée par quatre entreprises de la filière pour, notamment, la collecte de déchets dits de la catégorie 1 et de la catégorie 2, l’entreprise Valdélia étant agréée pour la gestion de 1% du volume total des déchets de la seule catégorie 2, ce pourcentage devant être porté, au terme de la période d’agrément, soit le 31 décembre 2027, à 10%.
Dans ce contexte, la juridiction a estimé que FEDEREC n’établit pas que l’agrément a préjudicié de manière suffisamment grave et immédiate à un intérêt public et aux intérêts qu’elle entend défendre :
- Compte des tonnages engendrée par l'activité de Valdélia en qualité d’éco-organisme de la filière à responsabilité élargie du producteur de produits et matériaux de construction du secteur du bâtiment, elle n'a pu être regardé comme susceptible seule de porter une atteinte grave aux intérêts des entreprises gestionnaires de déchets ;
- La fédération requérante n’ a apporté aucun élément chiffré au soutien de ses allégations relatives à la compétitivité, l’attractivité et la conservation de leur clientèle par les entreprises gestionnaires de déchets ;
- La fédération n'a pas établit davantage que l'activité de Valdélia porterait atteinte à la concurrence en accordant à l’entreprise agréée et aux entreprises de son réseau un avantage indu.
Si FEDEREC ne se désiste pas, un jugement au fond sera prononcé d’ici un ou deux ans.
Ce second jugement portera sur une requête déposée en parallèle par la fédération qui demande, cette fois-ci, l’annulation de l’agrément de l’éco-organisme.