Immobilier: La Banque n’a pas à vérifier les modalités de construction ou la faisabilité d’un projet immobilier lors de l’octroi d’un prêt (Cass, 7 février 2018)

Sand Castle on BeachPar Stéphanie Gandet – Avocat associé

Un arrêt de la Cour de cassation vient rappeler le champ de la mission des banques lors du financement de terrain destinés à supporter une construction (Cass, 7 février 2018, 16-21226).

Un contrat de prêt immobilier fut conclu entre la banque et des époux. Il s’inscrivait dans l’optique du financement de l’achat d’un terrain destiné à leur résidence secondaire.

Concomitamment à la réception des fonds, les deux époux ont alors signé un compromis de vente. In fine, la vente ne s’étant pas conclue, et les époux ont assigné en responsabilité la banque en invoquant des manquements lors de l’octroi du prêt et du déblocage des fonds.

Devant la résistance des juridictions du fond à admettre le bien fondé de leur demande, la Cour de cassation a pu se prononcer sur le litige.

Les époux estimaient que la Banque à qui est demandé un prêt destiné à financer un terrain, devant servir d’assise à la construction d’une résidence secondaire, doit s’informer sur la nature du projet qu’il finance et sur sa faisabilité et doit selon eux s’informer sur la nature et les modalités du projet de ses clients.

La Cour de cassation juge au contraire qu’une banque qui octroie un prêt destiné à financer l’acquisition d’un terrain sur lequel doit être construite une maison à usage d’habitation n’est pas tenue de s’informer des modalités de l’opération de construction projetée ni d’évaluer sa faisabilité.

S’agissant des modalités de déblocage des fonds, les époux reprochaient à la banque de ne pas avoir suspecté l’absence de pouvoir mandataire prétendu (M. A. qui n’était pas doté d’un pouvoir en réalité…) lorsqu’il lui avait transmis par fax la demande de déblocage des fonds et donné copie du courrier comportant les fausses coordonnées bancaires de la venderesse car la procuration du 8 décembre 2003 lui aurait donné un tel pouvoir pour agir auprès d’une banque française.

Ils estimaient qu’une banque prêteuse engage sa responsabilité si elle débloque les fonds d’un prêt sur le compte d’un particulier dont elle ne vérifie en rien l’identité et en s’abstenant de vérifier l’identité du titulaire du compte sur lequel elle virait les fonds prêtés.

Ils considéraient enfin que la banque, avant de virer les fonds, aurait dû au moins s’assurer que la vente avait été régularisée, ce qui aurait immédiatement permis de découvrir l’escroquerie dont les acquéreurs semblent avoir été victimes, alors qu’elle s’était contentée d’un simple compromis de vente rédigé en langue espagnole.

Là encore, la Cour de cassation juge que le faux pouvoir a bien été relevé par la Cour d’appel et que la Banque pouvait donc être responsable sur ce point.

Mais pour le reste, elle rappelle que la banque, en l’absence de stipulations contractuelles en ce sens ou d’anomalies apparentes, est tenue d’exécuter l’ordre de paiement donné par son client, sans avoir à s’assurer de l’identité de son bénéficiaire ou de la régularisation de la vente financée par les fonds prêtés.

La vigilance est donc de mise auprès des acheteurs en tout premier lieu.

Le caractère extra territorial de la vente a sans doute en l’espèce limité les possibilités d’action des acheteurs contre les vendeurs ou contre le notaire en charge de la réitération.

On comprend donc la double peine de ces requérants qui ont été escroqués, semble t’il à la lecture des termes de leur pourvoi, mais qui de surcroit de trouvent condamnés à rembourser la Banque, intérêts compris, de même qu’à des frais irrépétibles.

Dura lex, sed lex….