diagnostic performance énergétiqueDans une question parlementaire du 4 décembre 2012, la députée UMP Michèle Tabarot interpelait le Ministre de l’égalité des territoires et du logement sur les dysfonctionnements du diagnostic de performance énergétique (DPE). Elle évoquait notamment le manque de fiabilité des diagnostics réalisés, mais aussi des pratiques abusives difficilement sanctionnables en raison de l’inopposabilité du DPE.

 

C’est ici l’occasion de rappeler les dernières modifications intervenues réglementairement et en jurisprudence sur la question des DPE.

 

Dans sa réponse du 16 juillet 2013, le Ministre rappelle que si le DPE n’est qu’un document d’information, de sensibilisation et d’incitation, destiné à renseigner sur la performance énergétique d’un logement ou d’un bâtiment, sa réalisation est obligatoire :

–          lors de la vente d’un immeuble ;

–          lors de la signature d’un bail d’habitation ;

–          lors de la signature d’un bail commercial ;

–          pour les bâtiments neufs dont le permis de construire a été déposé après le 1er juillet 2007.

 

Concernant la compétence et la fiabilité des diagnostiqueurs, il précise que des procédures de certification des diagnostiqueurs existent depuis 2007 : en effet, leurs compétences doivent être certifiées conformément aux dispositions  du code de la construction et de l’habitation (articles R. 134-4 et L.271-6), qui obligent également le professionnel à avoir une assurance.

Depuis le 1er février 2012, des organismes de certification accrédités par le comité français d’accréditation vérifient en outre ces compétences en soumettant les diagnostiqueurs à un examen théorique et à un examen pratique (arrêté du 13 décembre 2011, NOR : DEVL1130801A : JO, 24 déc.). Ces organismes délivrent deux types de certifications, qui doivent être renouvelées tous les cinq ans :

  • la certification sans mention, dite « diagnostic de performance énergétique individuel », valable pour les opérateurs réalisant des DPE pour les maisons individuelles, 
  • la certification avec mention, dite « diagnostic de performance énergétique tous types de bâtiments », valable pour les opérateurs réalisant des DPE pour les immeubles autres que d’habitation.

 

Concernant la fiabilité du DPE, le Ministre explique que suite au constat de dysfonctionnements, un plan d’amélioration a été élaboré. Ce plan a été intégré au dispositif réglementaire par plusieurs arrêtés de 2012 (arrêté du 27 janvier 2012 exigeant la validation des logiciels, arrêtés du 8 février 2012 modifiant les arrêtés DPE « vente » et « location », arrêté 17 du octobre 2012 modifiant la méthode 3CL-DPE) publiés en avril 2013.

 

Les apports de la réforme sont les suivants : 

  1. une fiche technique est ajoutée au DPE pour assurer la transparence des données renseignées par le diagnostiqueur ;
  2. une nouvelle méthode de calcul permettant d’affiner le diagnostic (qui passe de 30 à 60 points) a été retenue ;
  3. les logiciels utilisés doivent désormais être uniformisés et validés ;
  4. une base de données pour le recueil des DPE doit être créée courant 2013 ;
  5. le niveau de formation des diagnostiqueurs a été relevé : il passe à bac+2 dans les domaines des techniques du bâtiment. Une formation continue est également instaurée, et les conditions de réussite de l’examen permettant l’obtention d’une certification ont été durcies.
  6. Le contrôle et de la qualité des diagnostics sont améliorés grâce à la base de données dont l’Ademe et à une opération spéciale de contrôle menée auprès les organismes certificateurs.

 

Concernant les possibilités de mise en cause de la responsabilité du diagnostiqueur par un consommateur mécontent, le Ministre identifie deux recours envisageables.

Ainsi, il est d’une part possible de se rapprocher de l’organisme de certification, qui assure également une mission de surveillance.

D’autre part, le consommateur, peut toujours engager la responsabilité délictuelle du diagnostiqueur sur base de l’article 1382 du code civil. Il devra toutefois établir l’existence d’un dommage. Quelques décisions judiciaires confirment en effet cette possibilité.

Ainsi, le TGI de Paris a considéré que l’acheteur induit en erreur par un DPE inexact avait subi un préjudice dans la mesure où, n’étant pas en mesure d’évaluer le bien à sa juste valeur, il avait perdu une chance de négocier le prix à la baisse ou de renoncer à la transaction (TGI Paris, 5e ch., sect. 2, 7 avr. 2011, n°09/15353).  

La Cour d’appel d’Angers (CA Angers, ch. com., 13 déc. 2011, n°10/02273) a, sur le même fondement, condamné un professionnel à indemniser le dommage de l’acheteur qui avait dû réaliser des travaux de rénovation thermique suite à un DPE sous-estimant considérablement les coûts annuels de chauffage. La cour de Cassation a toutefois très récemment annulé cette dernière décision au motif que le manquement à un devoir d’information et de conseil s’analyse tout au plus en une perte de chance pour l’acquéreur de renoncer à acquérir le bien litigieux ou de l’acquérir à des conditions plus avantageuses « dès lors qu’il n’est pas certain que mieux informé, le créancier de l’obligation d’information se serait trouvé dans une situation différente et plus avantageuse » (Cass. 1re civ., 20 mars 2013, n°12-14.711).

Il semble donc indispensable pour l’acheteur d’établir que le DPE a influencé sa décision de conclure le contrat de vente, et qu’il ne l’aurait pas fait si les données fournies avaient été différentes. Une telle preuve est bien évidemment très difficile à produire.

 

Enfin, dans la mesure où le DPE n’est pas opposable au vendeur (CCH, article L. 271-4), une action en nullité du contrat au seul motif que le diagnostic contenait des informations erronées n’est pas possible. D’après le Ministre, l’annulation de la vente n’est envisageable qu’en cas de dol du vendeur. On ajoutera que l’acheteur pourrait aussi engager la responsabilité du vendeur pour non-respect de son obligation légale d’information. Ce dernier pourra alors  appeler en garantie le diagnostiqueur ayant rédigé un DPE inexact.

 

Lou Deldique

Green Law Avocat