Toiture en panneaux solairesPar un intéressant arrêt du 19 novembre dernier, la Cour administrative d’appel de Bordeaux a rappelé que le Maire demeurait compétent pour statuer sur une demande de permis de construire relative à un hangar agricole, même si une installation photovoltaïque produisant de l’électricité injectée sur le réseau de distribution d’électricité était intégrée en toiture.

En effet, un permis de construire délivré par le Maire de la commune avait été annulé en première instance à la demande de tiers qui avaient invoqué l’incompétence du Maire au profit du Préfet. Par exception à la compétence de principe du Maire, l’article R 422-2 du code de l’urbanisme prévoit en effet que le Préfet est compétent pour statuer sur les demandes de permis de construire relatives à des installations de production d’électricité: « Le préfet est compétent pour délivrer le permis de construire (…) dans les  hypothèses suivantes : (…) b) Pour les ouvrages de production, de  transport, de distribution et de stockage d’énergie lorsque cette énergie n’est  pas destinée, principalement, à une utilisation directe par le demandeur ;  (…) ».

Or, la Cour administrative d’appel de Bordeaux rappelle tout d’abord que l’existence d’une toiture solaire sur un hangar de stockage de fourrages n’est pas par elle-même « compte tenu du caractère accessoire à la construction de cette installation » de nature à modifier la destination agricole de ce bâtiment.

Et surtout, la Cour précise que la centrale solaire ne saurait conférer à la construction prise globalement le caractère d’un « ouvrage de production d’énergie » au sens du b) de l’article R. 422-2 précité du code de l’urbanisme quand bien même l’énergie ainsi produite serait destinée à la revente. Par conséquent, les juges d’appel censurent le jugement de première instance qui avait annulé le permis de construire en considérant qu’il relevait à ce titre de la compétence du préfet (CAA Bordeaux, 19 nov. 2013, n°12BX00942).

Cette solution est dorénavant constante: la même Cour avait en effet déjà jugé en ce sens par un arrêt du 25 avril 2013 (CAA Bordeaux 25 avril 2013 Ministre de l’écologie, du développement durable,  des transports et du logement c/ M. Jean A., n° 11BX03399).

Et surtout, cette solution est logique au regard du décret n° 2012-274  du 28 février 2012 dont est issu l’article R 422-2-1 du Code de l’urbanisme, et qui prévoit expressément que « Les  installations de production d’électricité à partir d’énergie renouvelable accessoires à une construction ne sont pas des ouvrages de production  d’électricité au sens du b de l’article L. 422-2 ».

Néanmoins, étant donné que le décret ne s’appliquait qu’aux demandes déposées à compter du 1er mars 2012, des éclaircissements pouvaient être nécessaires en jurisprudence.

Les arrêts précités de la CAA de Bordeaux à cet égard sont enrichissants puisque les juridictions du fond étaient d’abord partagées sur la question:

  • Le Tribunal administratif de Nîmes avait jugé que la réalisation d’une  construction de serres agricoles, avec local vestiaire et sanitaire et  production d’énergie photovoltaïque au sein d’un projet de Land art ne portait pas  exclusivement sur un ouvrage de production d’énergie au sens de l’article R.  422-2 précité (TA Nîmes 26 avril 2013, « Société a. », n° 1101948),
  • Le Tribunal administratif de Limoges avait quant à lui considéré qu’un hangar agricole présentant en toiture une centrale photovoltaïques dont  l’électricité était destinée à être réinjectée sur le réseau de distribution publique et qui  n’est donc pas destinée principalement à une utilisation directe par le bénéficiaire constitue un ouvrage de production d’énergie relevant de la compétence du Préfet  (TA Limoges, 16 février  2012, « M et Mme B. », n° 1000636).

Certaines décisions précédentes, avant l’entrée en vigueur du décret du 28 février 2012, peuvent encore garder de leur pertinence au regard des critères retenus pour qualifier la construction « d’ouvrage de production d’électricité ».

Ainsi, le Tribunal administratif de Montpellier avait retenu que la construction d’ombrières constituées de structures métalliques dans lesquelles sont intégrées  des panneaux photovoltaïques d’une taille de 200 mètres par 20 mètres intégrant 7 500 panneaux solaires chacune excèdent les seuls besoins des  requérants et relève, compte tenu du caractère indivisible du projet et de son  ampleur, de la compétence du Préfet conformément à l’article R. 422-2 du code de  l’urbanisme (TA Montpellier 24 mai 2012, « M. S. », n°1002232). En outre, un jugement du Tribunal administratif de Pau retient qu’un hangar  agricole intégrant en toiture des panneaux photovoltaïques sur une large superficie, construit par une société spécialisée, et qui  produira un volume d’électricité susceptible de satisfaire les besoins de 67 foyers, ne servira pas exclusivement aux besoins de  l’exploitant agricole mais pourra être revendue à EDF constitue un ouvrage de  production d’électricité (TA Pau 26 mars 2013 M. et Mme Patrick  W.,  n°1101413).

Stéphanie Gandet

Green Law Avocat