MISE A JOUR DE LA METHODOLOGIE NATIONALE EN MATIERE DE GESTION DES SITES ET SOLS POLLUES : LES POINTS-CLEFS

Ruins of a very heavily polluted industrial site at Copsa Mica,Romania.In 1990's the place was known as one of the most polluted towns in Europe.

 

Par

Maître Yann BORREL – Green Law Avocats

yann.borrel@green-law-avocat.fr

La méthodologie nationale en matière de gestion des sites et sols pollués est définie par la Direction générale de la Prévention des Risques (D.G.P.R.). Cette méthodologie a été actualisée en avril 2017, à l’occasion de la publication de notes, d’instructions et de guides sur le site internet du Ministère de la Transition écologique et solidaire (http://www.ecologique-solidaire.gouv.fr/sites-et-sols-pollues).

Une note du 19 avril 2017 à l’attention des Préfets expose les raisons pour lesquelles la méthodologie nationale a fait l’objet d’une actualisation de la part des services de la D.G.P.R :

Note du 19 avril 2017 relative aux sites et sols pollués – Mise à jour des textes méthodologiques de gestion des sites et sols pollués de 2007 (NOR : DEVP1708766N)

Par ailleurs, une note d’introduction fait le point sur les principales évolutions de la méthodologie nationale de gestion des sites et sols pollués depuis une vingtaine d’années : Introduction à la méthodologie nationale de gestion des sites et sols pollués

Au demeurant, la méthodologie nationale de gestion des sites et sols pollués est détaillée dans un document de 128 pages qui constitue pour la D.G.P.R. « un état de l’art consolidé dans le domaine des sols pollués » : Méthodologie nationale de gestion des sites et sols pollués

La note de la D.G.P.R. en date du 19 avril 2017 précise que l’introduction à la méthodologie et le guide méthodologique se substituent aux annexes de la note ministérielle en date du 8 février 2007 ayant pour objet les sites et sols pollués et relative aux modalités de gestion et de réaménagement des sites pollués.

La nouvelle méthodologie ne remet pas en cause les principes essentiels qui ont guidé l’action des pouvoirs publics en matière de sites et sols pollués depuis 2007. Ces principes sont notamment les suivants :

  • le principe de spécificité impliquant une appréciation au cas par cas : l’évaluation des risques doit être fondée sur la connaissance des milieux d’exposition mais aussi sur la réalité des usages ;

  • le principe de gestion par une approche « coûts-avantages » qui conduit à retenir, parmi les scénarios de gestion possible, celui qui constitue le meilleur compromis sur la base de considérations environnementales, sanitaires, techniques et économiques. Il s’agit de trouver un « optimum de pareto » visant à retirer le maximum de polluant tout en restant techniquement et économiquement acceptable ;

  • une démarche de gestion environnementale à articuler avec une démarche de gestion sanitaire. Les démarches suivantes ont, à cet égard, été définies :

  • il s’agit, d’une part, de l’interprétation de l’état de milieux (I.E.M.). L’I.E.M. vise à étudier la compatibilité de l’état des milieux avec des usages déjà constatés (zone résidentielle, culture, baignade, pisciculture, …). Les dégradations des milieux sont analysées au regard des conséquences sanitaires potentielles.

  • il s’agit, d’autre part, du plan de gestion, qui peut être mis en œuvre dans le cas où l’I.E.M. ferait apparaître une incompatibilité entre l’état des milieux et les usages constatés.

  • enfin, une méthode d’évaluation des risques dans la gestion des sols pollués a vu le jour dans les années 2000 pour mieux prendre en compte l’impact sanitaire d’une installation classée sur les personnes. Si cette méthode permet de hiérarchiser les différents polluants émis par une installation classée, leurs sources et les voies d’exposition, en vue de définir des stratégies de prévention et de gestion spécifiques à chaque installation, elle ne permet pas, en revanche, de déterminer l’impact réel de ces polluants sur la santé des populations aux alentours, de même que l’exposition réelle de ces populations. Seules des études épidémiologiques ou d’imprégnations permettent d’apporter des éléments de réponse sur ces deux points.

C’est dans le but d’améliorer la cohérence et l’articulation de la gestion environnementale des sites et des sols pollués avec la gestion sanitaire de ces sites qu’une instruction interministérielle a été publiée en avril 2017 :

Instruction interministérielle n° DGS/EA1/DGPR/DGAL/2017/145 du 27 avril 2017 relative à la gestion des sites pollués et de leurs impacts nécessitant la mise en œuvre de mesures de gestion sanitaire et d’études de santé et/ou de mesures de gestion sanitaire de productions animales ou végétales

Cette instruction détaille les outils des actions que les Préfets pourraient mettre en œuvre dans le but de gérer plus efficacement des sites pollués présentant une gestion environnementale et sanitaire « complexe ». Rappelons que ces sites ont fait l’objet d’un recensement dans le cadre d’une instruction interministérielle en date du 14 avril 2016 : INSTRUCTION INTERMINISTERIELLE N° DGS/EA1/DGPR/2016/120 du 14 avril 2016 relative au recensement des sites pollués présentant une gestion environnementale et sanitaire complexe

L’instruction interministérielle en date du 27 avril 2017 retiendra tout particulièrement l’attention du lecteur sur le fait qu’elle vise à faire un point sur les possibilités de mise en œuvre de procédures du code de la santé publique relatives à l’insalubrité en cas de pollution des sols.

Selon l’instruction, la mise en œuvre de ces procédures ne serait pas parfaitement adaptée puisque la cause de la pollution, dans le cas général, n’est imputable ni au propriétaire, ni au bailleur des immeubles d’habitation. Elle admet néanmoins qu’en l’absence de toute autre possibilité, la mise en œuvre de ces procédures pourrait être envisagée :

« Toutefois, en l’absence de toute autre possibilité, au regard du cas d’espèce et des risques avérés pour la santé, l’utilisation de la procédure prévue à l’article L. 1331-25 du code de la santé publique, relative au périmètre insalubre, pourrait être envisagée en justifiant l’utilisation de ce dispositif compte tenu de l’exposition sanitaire des populations et au regard de la forte insécurité juridique que le recours à cette procédure est susceptible de générer, au vu notamment des conséquences prononcées à l’encontre des propriétaires. »

Comme le souligne l’instruction interministérielle, la mise en œuvre de procédures relatives à l’insalubrité pourrait conduire à l’engagement de recours à l’encontre de l’Etat puisqu’elle ferait peser sur les propriétaires concernés des mesures du fait d’actes d’autrui.

Les principales autres actions et préconisations que l’Etat se propose de mettre en œuvre aux termes de l’instruction interministérielle en date du 27 avril 2017 sont les suivants :

–    la mise à jour des bases de données relatives aux sites et sols pollués ;

–    l’intervention plus fréquente de l’ADEME sur les anciennes I.C.P.E. en cas de défaillance du responsable ;

–    la mise en œuvre plus fréquente des pouvoirs de police des préfets à l’encontre des responsables de pollutions des sols issues de l’exploitation d’I.C.P.E. ou de mines ;

–    le renforcement de la maîtrise de l’urbanisation impliquant notamment un renforcement des contrôles exercés sur les « maîtres d’ouvrages à l’initiative d’un changement d’usage » quant à la gestion par ces derniers des risques liés à une pollution résiduelle sur un terrain ;

–    un meilleur encadrement de la protection des données de santé pour mener les investigations environnementales complémentaires.